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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 134

Le mercredi 14 juin 2023
L’honorable Raymonde Gagné, Présidente


LE SÉNAT

Le mercredi 14 juin 2023

La séance est ouverte à 14 heures, la Présidente étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

La société d’habitation Camponi

L’honorable David M. Arnot : Honorables sénateurs, en Saskatchewan et dans de nombreuses autres provinces, on fait souvent référence à des territoires précis faisant l’objet de traités et à la patrie de la nation métisse. On peut toutefois avoir une patrie, mais aucun foyer. Un logement adéquat et abordable est souvent hors de la portée de nombreux autochtones au Canada. Je suis heureux d’annoncer qu’un organisme dirigé par des Métis s’efforce de donner accès à des logements adéquats aux personnes qui ont trop souvent été marginalisées en raison de leur identité autochtone, de leurs revenus et de leur handicap.

Le 26 mai, à Saskatoon, Camponi, en partenariat avec le gouvernement du Canada et le gouvernement de la Saskatchewan, a entamé les travaux de construction d’un tout nouveau complexe d’habitation communautaire. La mission de Camponi est de fournir « de bons logements à l’appui de communautés fortes ». Cet investissement dans les logements communautaires va bien au-delà de la construction d’un immeuble; il concerne les personnes qui vivront dans le nouveau complexe, soit plus de 150 familles.

Selon le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies, le droit au logement désigne le droit de disposer d’un lieu où l’on peut vivre en sécurité, en paix et dans la dignité et il devrait être intrinsèquement lié à la dignité de la personne.

Comme ce projet est dirigé par des Métis, il a aussi été pensé en réaction aux vieilles politiques, façons de faire et croyances qui ont nui aux Métis et aux peuples autochtones. Au fond, ce partenariat est un parfait exemple de réconciliation et d’inclusion. C’est d’ailleurs la vision recherchée. Fait intéressant, les personnes qui y habitent et les intervenants font partie du processus de planification depuis le début. L’ensemble des besoins de chacun, y compris des familles, est pris en compte.

Les personnes qui n’ont jamais été locataires ou qui ont du mal à louer un logis peuvent suivre un programme d’information où on leur expliquera leurs droits et leurs responsabilités. Ceux qui en ont besoin auront aussi accès à la gamme complète des services de soutien social.

Voilà ce qu’est le logement communautaire. Il faut que chacun se responsabilise, respecte l’autre et honore les droits de son prochain. L’affirmation de la citoyenneté doit passer par la justice réparatrice et reposer sur une approche qui vise à rétablir et à célébrer les liens entre les peuples et les différents groupes sociaux.

Honorables sénateurs, Camponi offre un toit aux Métis et aux peuples autochtones de la Saskatchewan depuis plus de 50 ans. Le secret de son succès? Le leadership et le dévouement. Je salue et je remercie les administrateurs de leur bienveillance et de leur dynamisme : Angela Bishop, Doug Richardson et Ron Rivard, sans oublier la présidente, Mercy Ohirko.

Chers collègues, veuillez vous joindre à moi pour saluer le complexe d’habitation Camponi, l’illustration parfaite d’une réconciliation dirigée par les Autochtones de la Saskatchewan.

Je vous remercie.

Le service commémoratif de l’Association canadienne des ex-parlementaires

L’honorable Marty Deacon : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du 24e service commémoratif annuel, dédié à la mémoire des parlementaires décédés au cours de la dernière année de session. Lundi matin dernier, 29 parlementaires ont été honorés lors de ce service commémoratif. C’était un honneur pour moi d’en apprendre l’existence et de pouvoir y assister après trois ans d’absence de service commémoratif en personne.

Pouvoir lire et entendre les contributions de chacune de ces 29 personnes était une expérience extraordinaire. En l’espace d’une heure, nous avons appris leur vie, et nous avons pris connaissance des membres de leur famille qu’elles laissaient derrière elles quand elles venaient à Ottawa pour exercer leurs fonctions parlementaires importantes. C’est le prix qu’il faut payer pour servir la population canadienne.

Il y a quelques moments qui m’ont marquée. Tout d’abord, notre nouvelle Présidente a livré un message merveilleux et chaleureux à l’intention et au nom des familles. Puis, le Chœur d’enfants d’Ottawa a interprété quatre magnifiques morceaux, le dernier étant l’hymne royal Dieu protège le Roi. Cet hymne, chanté de façon si merveilleuse, m’a fait penser au changement à la tête de la monarchie. La Musique centrale des Forces canadiennes avait invité six de ses excellents musiciens à cordes, et ils ont été accompagnés par son joueur de cornemuse pour quelques morceaux. Ils ont également joué sur le balcon aux côtés du Chœur d’enfants d’Ottawa.

Ce fut également une occasion remarquable d’observer les familles et les amis. Des rangées de chaises avaient été placées au milieu du parquet du Sénat, et les banquettes des sénateurs étaient toutes occupées. On pouvait clairement voir que la plupart des personnes présentes, si ce n’est toutes, n’étaient jamais venues à la Chambre rouge. Elles étaient impressionnées par le décor, les traditions et l’histoire. L’huissier du bâton noir, les pages et nos employés étaient présents pour veiller au respect du protocole dans les moindres détails. Le service commémoratif a vraiment été un événement d’envergure. Je me suis rappelé que nous sommes en juin. Alors que nous affairons ici et là pour nous acquitter de notre tâche au Sénat et que nous entrons dans la saison folle, notre personnel continue de s’occuper de bon nombre d’événements, pas uniquement nous. Aujourd’hui, je remercie tous les organisateurs de cet événement très spécial.

Le service commémoratif a été suivi d’une réception dans le salon des sénateurs. Encore une fois, de nombreuses questions ont été posées, et nous avons eu la possibilité de rencontrer les familles et d’en apprendre davantage au sujet des êtres chers qu’elles ont perdus. Je souligne que nous tous qui siégeons dans cette enceinte quitterons un jour cette vie comme les 29 parlementaires que nous avons honorés. À la fin du service, le nom de chacune des personnes décédées est mentionné à tour de rôle et les membres des familles se lèvent. C’est un moment très spécial que je n’oublierai jamais.

Pour terminer, j’aimerais reprendre les paroles prononcées par la fille du député John Mercer Reid à la clôture du service. À l’origine, ces paroles viennent de lord Minto, le huitième gouverneur général du Canada :

Les Canadiens et les Canadiennes ont marqué l’histoire et continuent de le faire chaque jour, mais la génération actuelle a plus de temps que les générations d’autrefois pour l’écrire et pour la lire. J’espère qu’elle continuera inlassablement de le faire. Elle y trouvera une source de fierté. Elle en est maintenant à pouvoir se permettre d’embellir l’héritage de ses villes, d’aider tout ce qui peine à faire surface dans les domaines de l’art et de la littérature, et j’espère qu’elle chérira tout ce qui est typiquement canadien et qu’elle le préservera contre les influences de nivellement d’un monde en difficulté.

Merci. Meegwetch.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de l’équipe de la Dollywood Foundation of Canada and North America, de la Waltons Trust, et du NWT Literacy Council. Ils sont les invités de l’honorable sénateur Ravalia.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Le programme Dolly Parton’s Imagination Library

L’honorable Mohamed-Iqbal Ravalia : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour souligner le travail important de la Dolly Parton’s Imagination Library ainsi que le très intéressant projet d’élargissement de cette initiative à ma province, Terre-Neuve-et-Labrador.

Dolly Parton’s Imagination Library est le principal programme de la fondation Dollywood de Dolly Parton, créée en 1999 par la légendaire musicienne en hommage à son père, qui ne savait ni lire ni écrire. Ce programme vise à encourager l’alphabétisation et à inspirer l’amour de la lecture chez les jeunes enfants en leur offrant un livre gratuitement, chaque mois, pendant les cinq premières années de leur vie. Les livres sont soigneusement sélectionnés par des professionnels du développement de l’enfant et sont adaptés à l’âge des enfants qui les reçoivent. Depuis le lancement de ce programme, plus de 174 millions de livres ont été envoyés à des enfants de cinq pays, et 1,9 million de livres sont envoyés à des enfants chaque mois.

Apprenant que Terre-Neuve-et-Labrador n’avait pas encore participé à ce programme, Carolyn Clarke, une concitoyenne et éducatrice dévouée, s’est chargée de trouver des commanditaires dans les régions de Twillingate, de New World Island et de Boyd’s Cove. Aujourd’hui, 90 % des enfants de nos collectivités sont inscrits au programme et ont déjà reçu leur premier livre. Elle a pu compter sur l’aide précieuse de Renee Sherstobetoff, qui vient elle aussi de Terre-Neuve.

(1410)

Grâce à la fiducie Waltons et à son don généreux, le programme Imagination Library pourra permettre aux enfants de partout dans ma province d’avoir accès à des livres. Rien de tout cela n’aurait été possible sans le soutien inestimable de la directrice régionale principale du programme, Jeanne Smitiuch, et de son équipe.

Honorables sénateurs, je crois que nous savons tous que le fait d’encourager les enfants à lire, à écrire, à compter et à développer de bonnes habitudes de lecture dès leur plus jeune âge a des effets bénéfiques sur leur vie et leur santé. J’invite tous ceux qui souhaitent mieux connaître le travail de la Dolly Parton Imagination Library à se rendre sur son site Web.

Je salue et je remercie notre ex-collègue du Sénat, Diane Griffin, car c’est grâce à ses efforts et à son dynamisme si l’Île-du-Prince-Édouard a été la première province du Canada à lancer ce programme sur l’ensemble de son territoire. Même si elle a entamé un nouveau chapitre de sa vie, son excellent travail continue de changer la vie de bien des gens, et elle nous manque terriblement. Merci aussi à Nora Briggs, de la fondation Dollywood, aux États‑Unis, à la fiducie Waltons et au Northwest Territories Literacy Council de tout ce qu’ils font pour l’alphabétisation et le développement des enfants, qui sont notre avenir.

Je crois que ce qui m’attriste le plus aujourd’hui, c’est que « Jolene » ne soit pas des nôtres; j’imagine qu’elle a fini par s’en aller avec son homme. Merci, meegwetch.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de l’aînée Claudette Commanda et d’un groupe de chefs et de directeurs d’entreprises autochtones qui ont assisté à un dîner-causerie dont le thème était Faire progresser la réconciliation économique sur la Colline. Ils sont les invités des honorables sénateurs Francis et Klyne.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Faire progresser la réconciliation économique sur la Colline

L’honorable Marty Klyne : Honorables sénateurs, plus tôt aujourd’hui, le sénateur Francis et moi avons eu le plaisir de participer à l’événement Faire progresser la réconciliation économique sur la Colline, une conférence organisée en partenariat avec l’Association nationale des sociétés autochtones de financement et la Banque des Premières Nations du Canada. L’objectif de la conférence était de discuter des façons de faire progresser la réconciliation économique au Canada.

La conférence réunissait des leaders, des entreprises et des organismes économiques autochtones dans le but de mettre en commun leur savoir et leurs réussites. Le sénateur Francis et moi avons été ravis de voir bon nombre de nos collègues et le greffier du Sénat et greffier des Parlements par intérim sur place. Nous avons entendu des histoires de partout au pays, et je suis reconnaissant à tous ceux qui ont participé. Les entreprises autochtones sont en plein essor dans notre nation de nations, et il est important de parler de leurs histoires et de leurs expériences, entre nous, mais surtout, entre tous les Canadiens.

Nous le savons tous, les gouvernements et les élus parlent souvent de réconciliation, en particulier du respect des droits et du redressement des injustices. La réconciliation économique n’est pas toujours la première qui vienne à l’esprit, mais c’est une question qui mérite plus d’attention. Nous ne parviendrons pas à une véritable réconciliation sans que les peuples autochtones soient habilités et qu’ils puissent atteindre leur potentiel économique maximal, et le pays ne pourra pas progresser tant que tous les habitants du Canada n’auront pas des possibilités équitables d’accéder à la prospérité.

Il est plus que temps que les Autochtones se réapproprient leur plein pouvoir économique. Les sénateurs savent déjà que cette question me tient à cœur. Le mois dernier, j’ai lancé une interpellation dans le but de faire connaître et de célébrer la réussite d’entreprises dirigées par des Autochtones. Depuis, plusieurs sénateurs de partout au pays ont pris la parole pour parler d’exemples de réussite dans leur région, et je suis impatient d’entendre d’autres sénateurs faire bientôt de même.

Chers collègues, le chemin vers la réconciliation doit passer par la réconciliation économique. Je suis reconnaissant envers l’Association nationale des sociétés autochtones de financement et la Banque des Premières Nations du Canada d’avoir été nos partenaires à l’égard de la conférence d’aujourd’hui et de contribuer à nous rappeler ce message. J’encourage tous les Canadiens à réfléchir aux moyens qui s’offrent à eux de favoriser la réconciliation économique dans leur propre collectivité, que ce soit en appuyant une entreprise locale dirigée par des Autochtones, en encourageant les administrations publiques à collaborer étroitement avec des partenaires autochtones ou simplement en se faisant l’ami et l’allié des Autochtones. Nous pouvons tous participer à faire du Canada un endroit plus inclusif où chacun peut prospérer.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Son Excellence Maria Andrelita S. Austria, ambassadrice de la République des Philippines, de l’honorable Jon Reyes, ministre du Travail et de l’Immigration du Manitoba, de la famille de feu le sénateur Enverga, Mme Rosemer Enverga et ses trois filles, ainsi que de stagiaires du Programme parlementaire national de stages des Philippines. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice Osler.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Le Mois du patrimoine philippin

L’honorable F. Gigi Osler : Merci, Votre Honneur, et félicitations pour vos nouvelles fonctions.

Chers collègues, plus tôt dans la journée, nous avons poursuivi la tradition consistant à hisser les drapeaux du Canada et des Philippines sur la Colline du Parlement, lors d’une cérémonie créée par notre ancien collègue, le regretté sénateur Tobias Enverga. Aujourd’hui, nous accueillons Mme Rosemer Enverga et ses trois filles, qui perpétuent l’héritage du sénateur Enverga. Je souhaite la plus cordiale des bienvenues à Son Excellence, l’ambassadrice des Philippines au Canada, Maria Andrelita Austria, ainsi qu’à son équipe de l’ambassade d’Ottawa. Enfin, je souhaite la bienvenue aux stagiaires du Programme national de stages parlementaires des Philippines.

Le mois de juin revêt une importance particulière pour les Canadiens d’origine philippine, puisqu’il s’agit du Mois du patrimoine philippin. Cette année, le 12 juin a marqué le 125e anniversaire de l’indépendance des Philippines et commémore la libération des Philippines après 333 ans de domination coloniale espagnole.

Aujourd’hui, chers collègues du Sénat, je souhaite vous raconter l’histoire de Benjamin Flores, le premier immigrant philippin au Canada selon les registres. Alors qu’il n’avait que 15 ans, Ben est arrivé sur l’île Bowen, en Colombie-Britannique, en 1861. Pêcheur et homme d’affaires, il a établi l’une des premières entreprises de location de bateaux. Même s’il ne s’est jamais marié et qu’il n’a pas eu d’enfant, son héritage est toujours vivant grâce à la mémoire collective de sa communauté. On a dit de M. Flores qu’il était exceptionnellement sympathique et généreux, et il demeure un personnage bien-aimé. Comme beaucoup de Philippins qui sont venus au Canada à la recherche de meilleures possibilités d’avenir, M. Flores a laissé une marque indélébile sur sa communauté.

Le Mois du patrimoine philippin est une occasion de célébrer la richesse de la culture philippine et de saluer la contribution exceptionnelle que les Philippins ont apportée à la société canadienne, d’un océan à l’autre.

En conclusion, faisons de notre diversité un moyen de renforcer et d’enrichir notre pays. Honorons la contribution durable des nombreuses communautés philippines partout au Canada. Vive — mabuhay ang — le Canada et les Pilipinas. Salamat po, meegwetch.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Reema Fuller et d’Aubrey Reeves. Elles sont les invitées de l’honorable sénatrice Coyle.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Français]

L’honorable Jacques Demers

Le trentième anniversaire de la victoire de la Coupe Stanley

L’honorable Chantal Petitclerc : Honorables sénateurs, c’était il y a 30 ans, l’adrénaline était à couper au couteau sur la glace, et les Canadiens de Montréal étaient à quelques minutes de remporter la coupe Stanley.

L’équipe n’était pas parmi les favorites, sans grande vedette, à l’exception de Patrick Roy. Toutefois, ce que les Canadiens de Montréal avaient, c’était des joueurs inspirés. L’ancien joueur du Canadien, Stéphan Lebeau, l’a dit : « Une équipe de qualité, avec beaucoup de profondeur, ça peut parfois devenir une équipe championne. »

Chers collègues, une équipe gagnante, cela prend du talent; cela prend des athlètes qui n’ont pas d’ego, qui pensent au groupe, à l’équipe. Au cœur de l’équipe, il faut un leader qui inspire, qui brasse la cage, qui rassemble ses joueurs; c’est le rôle de l’entraîneur. Les Canadiens de Montréal pouvaient compter sur le meilleur, un coach unique, passionné, audacieux, qui allait prendre leur talent, leurs efforts, et les mener vers la coupe Stanley.

Cet entraîneur, sénateurs et sénatrices, n’était nul autre que notre ancien collègue, le grand, l’honorable Jacques Demers — coach, pour les intimes. Certains disent que c’est son pèlerinage à la basilique Sainte-Anne-de-Beaupré qui aura fait la différence, mais ça, on ne le saura jamais.

(1420)

Ce qu’on sait, c’est que son discours avant la série a marqué tous les joueurs et que ses décisions audacieuses, dans le feu de l’action, ont été déterminantes.

Patrick Roy lui-même a dit ce qui suit :

Jacques Demers a été l’homme-clé de cette série. Sa décision de faire mesurer le bâton de Marty McSorley et de me retirer du but lors de la deuxième rencontre face aux Nordiques a fait toute la différence.

Avec sa passion, son audace et son cran, notre ancien collègue a su mener les joueurs vers la dernière coupe Stanley que le Canadien de Montréal ait gagnée. Trente ans plus tard, eh bien, on lui dit encore : « Merci, coach Demers! »

Merci. Meegwetch.

Des voix : Bravo!

[Traduction]

Visiteur à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Veena Kohli. Elle est l’invitée de l’honorable sénateur Marwah.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


[Français]

AFFAIRES COURANTES

Projet de loi sur les nouvelles en ligne

Présentation du sixième rapport du Comité des transports et des communications

L’honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le sixième rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, qui porte sur le projet de loi C-18, Loi concernant les plateformes de communication en ligne rendant disponible du contenu de nouvelles aux personnes se trouvant au Canada.

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 1831.)

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Housakos, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

L’étude des responsabilités du gouvernement fédéral à l’égard des Premières Nations, des Inuits et des Métis

Dépôt du douzième rapport du Comité des peuples autochtones

L’honorable Brian Francis : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le douzième rapport (provisoire) du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones intitulé Vu de l’extérieur : La mise en œuvre de la Loi sur le cannabis et ses effets sur les peuples autochtones. Je propose que l’étude du rapport soit inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.

(Sur la motion du sénateur Francis, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

La bibliothécaire du Parlement

Préavis de motion tendant à autoriser le renouvellement de sa nomination

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Sénat approuve le renouvellement de la nomination de Heather Powell Lank à titre de bibliothécaire parlementaire.


PÉRIODE DES QUESTIONS

La sécurité publique

Le Service correctionnel du Canada—Le transfert d’un détenu

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Sénateur Gold, hier, nous avons appris que le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, ne s’est pas contenté de faire semblant lorsqu’il a déclaré que le transfert du tueur en série Paul Bernardo à un établissement pénitentiaire à sécurité moyenne était une décision choquante et incompréhensible. Le ministre admet maintenant avoir été informé du transfert trois jours avant que cette décision ne soit rendue publique. Les membres du personnel du ministre étaient au courant du transfert depuis trois mois, mais ils ont affirmé ne pas l’en avoir informé. En outre, des représentants de Service correctionnel Canada soutiennent qu’ils ont fait parvenir des communiqués, à l’avance, au cabinet du ministre.

Monsieur le leader, ce n’est pas la première fois que le ministre Mendicino déforme la vérité à sa convenance.

Vous vous offusquez lorsque nous appelons un chat un chat et que nous expliquons au Sénat en quoi consiste le fait de ne pas dire la vérité. Ensuite, vous invoquez le Règlement lorsque nous donnons des exemples de manquements à la vérité.

Ce n’est pas la première fois que le ministre Mendicino invoque l’ignorance pour se justifier, mais c’est peut-être le pire cas d’espèce. Monsieur le leader, comment se fait-il que Marco Mendicino soit encore ministre? Quand le premier ministre le remerciera-t-il de ses services?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie.

Sans vouloir vous manquer de respect, je rejette les prémisses de votre question. Le ministre a dit qu’il était choqué et consterné et que c’était inacceptable, et c’est la stricte vérité. C’est aussi vrai que seul son cabinet a été informé quelques mois avant qu’un transfèrement soit envisagé, mais que lui ne l’a pas été. C’est enfin vrai, comme le ministre l’a reconnu, qu’il a été informé de toute cette affaire quelques jours avant qu’il fasse l’annonce que l’on sait.

Pour des questions de sécurité et de confidentialité, le ministère a dû attendre que l’affaire soit rendue publique pour exprimer son désarroi. Alors c’est faux de prétendre qu’il n’a pas dit la vérité.

Comme vous le savez, comme je l’ai déjà dit et comme il l’a lui‑même affirmé, le ministre a demandé à la commissaire du Service correctionnel du Canada de revoir sa décision, ce qu’elle est en train de faire.

Nous continuons d’estimer que les crimes graves exigent des peines sévères. Selon ce que j’en comprends, le premier ministre ou le ministre devraient révéler bientôt comment l’information a été traitée dans les mois avant que l’affaire sorte au grand jour.

Le sénateur Plett : Je sais que toutes nos questions vous offusquent, que vous les jugez trop partisanes ou indignes de l’opposition. Dès que quelqu’un de ce côté-ci s’exclame, vous hésitez, vous arrêtez de parler et vous nous prenez de haut en disant à quel point nous sommes méchants.

Monsieur le leader, le ministre Mendicino a induit les Canadiens en erreur à maintes reprises. Admettez-le. Il est inefficace de tellement de façons qu’il faudrait plus d’une période des questions pour en faire la liste, surtout avec vos réponses inadéquates. Il a aussi constamment induit les Canadiens en erreur au sujet du projet de loi C-21, y compris en ce qui concerne les amendements. Nous le savons tous, monsieur le leader. Il a dit qu’il respecte les propriétaires d’arme à feu respectueux des lois. Or, non, il ne les respecte pas. Il les a pris pour cible au lieu de cibler les criminels. Il a ciblé les chasseurs, les agriculteurs, les Autochtones du pays, les tireurs sportifs et les gens qui habitent en campagne.

Ils perçoivent la vérité, monsieur le leader, peu importe ce que le ministre Mendicino affirme. Pourquoi en êtes-vous incapable? Il s’est même avéré que la vedette de la LNH Carey Price en savait plus sur le projet de loi du ministre que le ministre lui-même.

(1430)

Certains ministres se seraient peut-être sentis contraints de dire la vérité après avoir été publiquement mis dans l’embarras. Ce n’est pas le cas du ministre Mendicino. Aujourd’hui, c’est vous qui le représentez ici, monsieur le leader. Monsieur le leader, le fait d’induire les Canadiens en erreur au sujet du projet de loi C-21, ou d’induire les Canadiens en erreur sur n’importe quoi d’autre n’est-il pas une raison pour qu’un ministre remette sa démission?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question.

J’hésite seulement lorsque je suis interrompu dans ma réponse par les sénateurs d’en face, ce que je continuerai à faire.

Le gouvernement fait confiance au ministre Mendicino pour la gestion des dossiers. Encore une fois, les allégations et les insinuations que vous faites ne sont pas fondées sur des faits.

[Français]

L’ingérence étrangère

L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Ma question s’adresse au sénateur Gold. Sénateur Gold, lorsque le Globe and Mail et Global News ont publié de l’information sur l’ingérence du régime de Pékin dans la politique canadienne, le ministre Mendicino a nié les faits. Lorsqu’on a su que Michael Chong et d’autres députés avaient été directement visés par le régime chinois, le ministre Mendicino l’a d’abord nié, puis il a rejeté la faute sur le Service canadien du renseignement de sécurité et Michael Chong.

Lorsqu’il est devenu évident que David Jonhston était à ce point lié à la famille Trudeau et à la Chine qu’il ne pouvait effectuer son travail, le ministre a continué à le défendre. On connaît la suite.

Sénateur Gold, il est évident que ce ministre n’a plus du tout sa place au sein du Conseil privé. Quand le premier ministre l’enverra‑t-il sur les banquettes arrière?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question. Comme je viens de le dire, le gouvernement a confiance au ministre et celui-ci continuera à servir le Canada conformément au mandat qui lui a été confié par le premier ministre.

Le sénateur Boisvenu : Sénateur Gold, je vous dirais que ma confiance envers le ministre n’existe plus, particulièrement lorsqu’il traite avec les victimes d’actes criminels. Dans les derniers mois, j’ai questionné le ministre Mendicino sur son engagement à respecter la Charte canadienne des droits des victimes pour ce qui est des familles des victimes du massacre de Portapique, en Nouvelle-Écosse.

J’ai rencontré ces familles et la famille Savoie, du Nouveau-Brunswick, dont la fille unique a été assassinée. J’ai eu droit à des paroles creuses de la part du ministre, pire encore, je n’ai reçu aucun suivi aux correspondances que je lui ai adressées. Le ministre Mendicino est incompétent pour traiter avec les victimes de crime et il n’a montré aucune sympathie et aucun intérêt pour les victimes et leurs familles. Pourquoi est-il encore ministre?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de la question. Je vais le répéter : il a été nommé ministre par le premier ministre, qui a confiance en lui, et il continuera à servir à titre de ministre selon les dispositions de son engagement et de son mandat.

Régie interne, budgets et administration

Les travaux du comité

L’honorable Renée Dupuis : Ma question s’adresse à la présidente du Comité sénatorial de la régie interne, des budgets et de l’administration. Madame la présidente, le comité a décidé de mettre fin à sa relation contractuelle avec la Bibliothèque du Parlement pour la revue de presse quotidienne envoyée aux sénateurs et sénatrices. Je comprends qu’un contrat a été conclu avec la société Critical Mention pour qu’elle mène un projet pilote pour ce même service de revue de presse aux sénateurs et sénatrices.

Jusqu’à maintenant, il était impossible de faire inclure dans la revue de presse un nombre important d’articles de médias locaux ou de médias communautaires qui s’intéressent aux travaux du Sénat et des sénateurs. Dans la réponse que je reçois depuis plusieurs années, on invoque entre autres des raisons techniques de licence de reproduction que la Bibliothèque du Parlement ne détiendrait pas.

Il est important que le Sénat ne se cantonne pas seulement aux médias qu’il a traditionnellement favorisés et s’ouvre aux nouveaux médias d’information. Maintenant que le Sénat a récupéré cette responsabilité, pouvez-vous nous confirmer que le comité que vous présidez s’assurera que cette entreprise rejoindra les médias locaux et communautaires dans toutes les régions du Canada?

L’honorable Lucie Moncion : Je vous remercie de la question, sénatrice Dupuis. Lorsque vous avez parlé de Critical Mention, dont les services sont maintenant utilisés par le service des communications du Sénat, ce que je peux faire avec votre demande, c’est de l’amener un peu plus loin pour voir si nous sommes en mesure d’étendre la couverture de revue de presse à toutes les régions du Canada. Il y avait un défi au sujet des accès, mais on peut voir jusqu’où on peut aller dans cette recherche, puis tenter d’accommoder davantage tous les sénateurs des régions.

La sénatrice Dupuis : J’ai une question complémentaire. Il existe une liste de médias communautaires reconnus pour toutes les régions du Québec sur le site du gouvernement du Québec. Il est possible que de pareilles listes existent dans les autres provinces et territoires. Est-ce que le comité fera un suivi auprès de la société choisie pour assurer les services de presse afin de vérifier si ces outils de communication sont disponibles ailleurs au pays?

La sénatrice Moncion : Je vous remercie de la question complémentaire. Je vous remercie de vos suggestions, je les porterai à l’attention du service des communications afin de lui demander d’élargir les accès et de vérifier les capacités. Je pourrai ensuite vous revenir avec une réponse. Je vous remercie vraiment de la question.

[Traduction]

La sécurité publique

Le Cadre national en matière de détention liée à l’immigration

L’honorable Kim Pate : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement.

Le Canada s’est servi de prisons provinciales pour incarcérer des milliers de demandeurs d’asile et de migrants pour des motifs purement administratifs.

En 2021, la campagne #BienvenueAuCanada demandait aux autorités canadiennes de cesser d’utiliser les prisons provinciales pour les mises en détention liées à l’immigration. Des dizaines de spécialistes de la justice sociale, d’organismes communautaires et de personnes ayant été incarcérées pour des motifs liés à l’immigration ainsi que des centaines d’avocats, d’universitaires, de professionnels de la santé et de dirigeants religieux du Canada demandent eux aussi que les provinces et le gouvernement fédéral mettent fin à cette pratique.

Cette année, l’enquête du coroner sur la mort du réfugié d’origine somalienne Abdurahman Hassan a braqué les projecteurs sur certains aspects douteux du régime de mise en détention pour des motifs liés à l’immigration et sur la mauvaise condition des prisons provinciales. En tout premier lieu, le jury a recommandé à l’Ontario de refuser désormais qu’on utilise ses prisons pour incarcérer des immigrants. Lundi, l’équipe éditoriale du Toronto Star a fait écho à cette demande.

Jusqu’à présent, cinq provinces, à savoir l’Alberta, la Colombie-Britannique, la Nouvelle-Écosse, la Saskatchewan et le Manitoba, ont résilié les contrats de détention pour des motifs liés à l’immigration qui les liaient à l’Agence des services frontaliers du Canada.

Quand le gouvernement du Canada cessera-t-il d’incarcérer des migrants et des demandeurs d’asile dans les prisons provinciales du pays pour des motifs purement administratifs?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie, sénatrice. Chers collègues, la détention administrative est un dernier recours. Le gouvernement est conscient qu’il faut en faire plus. C’est pourquoi on m’a informé que, par l’entremise du Cadre national en matière de détention liée à l’immigration, le gouvernement a pris plusieurs mesures pour s’attaquer à ce problème important. Primo, il a publié une directive ministérielle interdisant l’incarcération de mineurs; secundo, et il s’agit d’un point essentiel, il a amélioré les conditions générales dans les centres de surveillance de l’immigration et élargi la gamme des services de santé qui y sont offerts; tertio, il a de moins en moins recours aux établissements provinciaux, ce qui constitue un autre point important.

La sénatrice Pate : Je vous remercie de votre réponse, sénateur Gold.

Quel échéancier envisage-t-on pour mettre fin à la détention d’immigrants dans les prisons provinciales?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question.

Je ne suis pas en mesure d’y répondre. Je vais assurément me renseigner afin de déterminer comment les choses progressent.

La défense nationale

Les Forces armées canadiennes—La rétention des membres

L’honorable Percy E. Downe : Sénateur Gold, comme vous le savez, tous les Canadiens sont reconnaissants envers les pays qui ont envoyé des pompiers pour lutter contre nos incendies de forêt, qui sont hors de contrôle. Toutefois, de nombreux Canadiens ont été surpris que cette aide arrive après que le Canada, comme me l’ont indiqué de hauts fonctionnaires, ait — pour la première fois de l’histoire du pays — lancé une demande d’aide internationale. Le manque de ressources au pays et le sous-financement permanent de l’infrastructure de lutte contre les incendies et des Forces armées canadiennes reviennent nous hanter, et nous en sommes réduits à demander de l’aide d’autres pays.

(1440)

Une partie du problème au Canada est que les Forces armées canadiennes ont du mal à recruter et à retenir des effectifs. Il nous manque actuellement 16 000 recrues, et le nombre de départs des Forces armées canadiennes est plus élevé qu’il ne l’a jamais été. L’un des problèmes de rétention dont j’entends parler concerne les soins médicaux offerts aux familles des membres des Forces armées canadiennes. Lorsque les membres sont transférés d’une province à l’autre, leur couverture médicale continue d’être assurée par les Forces armées canadiennes, mais les membres de leur famille se retrouvent au bas des listes d’attente provinciales, qui comptent des milliers et des milliers de noms.

Afin d’améliorer la rétention des effectifs, pourquoi le gouvernement n’étend-il pas la couverture médicale aux familles des membres des Forces armées canadiennes lorsqu’ils sont transférés?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Je vous remercie aussi d’avoir fait le lien entre l’enjeu dont vous parlez et le travail crucial qu’accomplissent les Forces armées canadiennes dans de multiples domaines, en particulier le travail qu’ils font ici pour nous aider à composer avec un nombre record de feux de forêt dévastateurs.

Le gouvernement du Canada est conscient que le recrutement et la rétention de militaires posent des défis. C’est un enjeu dont il a déjà été question au Sénat et qui suscite des réflexions en ce moment. Celles-ci portent notamment sur les mesures à envisager pour le recrutement et la rétention de membres des Forces armées canadiennes, y compris lorsqu’ils déménagent dans une autre région du pays.

Je porterai assurément votre question à l’attention de la ministre appropriée.

Le sénateur Downe : Merci, sénateur Gold; j’apprécie. Comme vous le savez, la pénurie de main-d’œuvre dans les Forces armées canadiennes, estimée à plus de 16 000 personnes, combinée à divers engagements, dont la mission en Lettonie et l’entraînement des forces ukrainiennes actuellement en cours au Royaume-Uni, force le Canada — un État membre du G7 par ailleurs très riche — à demander, pour la première fois de son histoire, de l’aide internationale pour lutter contre les incendies de forêt qui font actuellement rage au pays. Quelle situation embarrassante pour un pays possédant des ressources financières considérables et une riche histoire militaire.

Si les Forces armées canadiennes n’arrivent pas à recruter de nouveaux membres, le gouvernement pourrait-il au moins s’employer à retenir les militaires qui sont déjà actifs, en appliquant la même formule que les États-Unis, c’est-à-dire en offrant l’assurance-maladie aux familles des militaires? Quand un membre des Forces armées canadiennes est transféré à l’Île‑du‑Prince‑Édouard, il continue de bénéficier de l’assurance médicale qui lui est fournie par son employeur, mais les membres de sa famille tombent au bas d’une liste d’attente de plus de 30 000 noms dans une province qui compte 170 000 habitants. Leurs chances de se trouver un médecin de famille sont à peu près nulles.

Quand le gouvernement du Canada appuiera-t-il les familles de militaires pour aider à retenir les militaires déjà en poste, et quand offrira-t-il le même niveau de service que l’armée américaine donne aux familles de ses membres?

Le sénateur Gold : Je vous remercie encore une fois de votre question et de faire état de cet important enjeu. Je répète que le gouvernement s’occupe de l’ensemble des problèmes à régler et qu’il apprécie toute l’aide qui peut lui être donnée pour lutter contre les incendies de forêt. À ce chapitre, je signale que le Canada a déjà prêté main-forte à d’autres pays et qu’il sera reconnaissant de toute l’aide qui lui sera fournie.

Je me renseignerai, monsieur le sénateur. Il s’agit en effet d’un enjeu important. Merci.

La sécurité publique

Le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement

L’honorable Andrew Cardozo : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat, mais permettez-moi d’abord de commencer sur une note positive en soulignant que les Canadiens ont récemment envoyé 500 millions de dollars à l’Ukraine pour soutenir ses efforts de guerre, comme l’a annoncé le premier ministre Justin Trudeau à Kiev, la fin de semaine dernière. Ma question porte sur l’ingérence étrangère au Canada, et j’aimerais revenir sur une question que j’ai posée il y a quelques semaines à peine, au moment où le très honorable David Johnston a publié son rapport. À mon avis, il existe une troisième option qui regrouperait certaines des idées qu’il a présentées ainsi que diverses idées soulevées par d’autres.

En gardant à l’esprit sa suggestion que le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement ainsi que l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement passent en revue tous les documents qu’il a lui-même examinés, je considère qu’il faudrait aussi lancer une enquête publique nationale où ces deux entités auraient la responsabilité de passer en revue tous les documents qui ne pourront pas être rendus publics dans le cadre de l’enquête. Je présume que, durant une enquête publique de ce genre, il y aura des aspects qui seront publics tandis que d’autres se dérouleront à huis clos. C’est pourquoi j’estime que l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement pourrait jouer rôle important dans l’examen des documents. Quelle est l’opinion du gouvernement sur le fait de tenir une enquête publique en ce moment?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question et de vos suggestions. Comme tous les sénateurs et les Canadiens le savent, des discussions sont en cours entre les chefs des partis de l’opposition et le gouvernement en ce qui concerne le mandat, le déroulement et la structure d’un processus public ainsi que, bien entendu, la personne qui pourrait diriger ce processus. Le gouvernement du Canada est heureux de constater que les partis d’opposition travaillent ensemble. Selon ce que je sais, des rencontres bilatérales sont en cours ou devraient avoir lieu entre les chefs des deux principaux partis, et le gouvernement du Canada espère qu’un consensus émergera bientôt entre les partis de l’autre endroit afin que le travail puisse se poursuivre.

Le sénateur Cardozo : Je vous remercie, sénateur Gold. J’aimerais simplement ajouter qu’à mon avis, deux choses sont absolument essentielles pour que l’enquête soit complète : d’une part, elle doit s’intéresser à l’ingérence exercée par tous les pays, qu’il s’agisse de la Chine, de la Russie, de la Corée du Nord, de l’Iran, du Venezuela ou de n’importe quel autre État. D’autre part, elle doit porter sur toutes les formes d’ingérence : politique, économie, éducation, sciences, communications, haute technologie, immigration, affaires étrangères — rien ne doit être exclu.

Pouvez-vous faire pression sur le gouvernement pour que l’examen à venir soit le plus vaste et le plus exhaustif possible et que, loin de se limiter aux événements qui font actuellement les manchettes, il s’intéresse à l’avenir d’un problème qui risque de causer des maux de tête à la quasi-totalité des pays dans les années à venir?

Le sénateur Gold : Encore une fois merci de votre question et de vos suggestions. Le gouvernement du Canada et les services de renseignement du pays savent depuis un certain temps que ce problème prend de l’ampleur et qu’il est de plus en plus préoccupant. C’est en tout cas ce qui ressort des rapports et des déclarations du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement et, bien entendu, du rapport de l’honorable David Johnston.

À cette étape-ci du processus, les représentants de tous les partis politiques de l’autre endroit doivent s’entendre sur le mandat de la personne qui sera chargée de l’enquête, et le gouvernement espère que ce processus aboutira le plus rapidement possible.

Le Service correctionnel du Canada—Le transfert d’un détenu

L’honorable Leo Housakos : Monsieur le leader du gouvernement, la réponse du gouvernement à la question de mes collègues les sénateurs Plett et Boisvenu concernant la compétence du ministre Mendicino est honteuse. Monsieur le leader du gouvernement, voici la vérité : le problème n’est pas que le ministre Mendicino n’ait pas annoncé le transfert de Paul Bernardo; le problème est qu’il a fait l’idiot une fois que l’information a été rendue publique et qu’il a agi comme si c’était la première fois qu’il en entendait parler. Voilà le problème avec le ministre Mendicino.

Il semble que le premier ministre Trudeau et le ministre Mendicino aient pour habitude de jouer les idiots chaque fois qu’ils sont interpellés, comme lorsque le ministre a été interpellé il y a plusieurs semaines au sujet de sa déclaration selon laquelle tous les postes de police illégaux au Canada avaient été fermés, alors que quelques jours plus tard, nous apprenions qu’il y en avait encore quelques-uns en activité dans notre propre ville. Le ministre a joué les idiots, et pire encore, il a blâmé la GRC.

Ma question est très simple, monsieur le leader du gouvernement : le ministre Mendicino fait-il l’imbécile ou est-il possible qu’il soit vraiment aussi incompétent?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Non, la réponse n’est ni l’un ni l’autre, sénateur. Vous continuez d’affirmer qu’il y a des postes de police en activité dans notre province d’origine sans aucun fondement, si ce n’est des reportages dans les médias. Il se peut très bien qu’il y en ait; ils font l’objet d’une enquête de la GRC, comme je l’ai dit à maintes reprises, et je continuerai à le rappeler au Sénat chaque fois que vous soulèverez la question.

(1450)

Je ne suis pas impatient, mais telle est la réponse, et c’est la réponse que je continuerai de fournir jusqu’à ce que les résultats de l’enquête soient rendus publics.

Le sénateur Housakos : Premièrement, c’est le ministre lui‑même qui a confirmé que ces postes de police sont en exploitation au Canada, et il induit le Parlement en erreur par rapport à ce qu’il fait ou ne fait pas à leur égard. Voilà le problème. Je le répète, ou bien le ministre ou son personnel sont incompétents, ou bien le ministre induit délibérément le Parlement en erreur.

La question qui s’impose alors est de savoir si c’est la raison pour laquelle le ministre se traîne les pieds pour ce qui est de mettre en place un registre des agents étrangers. Si le ministre et le gouvernement prenaient la question de l’ingérence étrangère au sérieux, ce registre serait déjà en place. Un projet de loi tarde à franchir les étapes du processus législatif au Sénat parce que le gouvernement se traîne les pieds et ne fait rien dans ce dossier. C’est bien simple.

D’une façon ou d’une autre, quand va-t-on congédier le responsable de la façon absolument honteuse dont le ministre traite de nombreux dossiers? Aucun registre des agents étrangers n’est en place. Des postes de police illégaux sont en exploitation sur notre territoire. Un meurtrier brutal est transféré dans une prison à sécurité minimum dans ce pays parce que le ministre ne fait pas son travail et ne protège pas l’intérêt de la sécurité publique au pays. Nous ne pouvons même pas obtenir de réponse franche de la part du représentant ou leader du gouvernement au Sénat.

Le sénateur Gold : Sauf votre respect, il y a une différence entre une réponse claire et une réponse qui ne correspond pas à vos désirs. Je vous ai répondu à de nombreuses reprises.

En ce qui concerne les allégations relatives aux postes de police illégaux, comme je l’ai dit à d’autres occasions, il se peut très bien — et nous ne le saurons pas tant que l’enquête ne sera pas terminée et rendue publique — que certaines activités se déroulant dans un ou plusieurs endroits, que ce soit au Québec ou ailleurs, aient été effectivement illégales et que ces postes aient été fermés et qu’ils aient pu réapparaître ou non. Je n’ai jamais entendu dire, honorable collègue, que chaque personne, chaque programme et chaque salle dans chacun de ces lieux étaient consacrés à des activités illégales.

Deuxièmement, si vous laissez entendre qu’il aurait été approprié que le ministre de la Sécurité publique donne des instructions au Service correctionnel du Canada sur la manière de gérer l’incarcération de M. Bernardo ou de toute autre personne, cela témoignerait, avec tout le respect que je vous dois, soit d’une méconnaissance de l’indépendance nécessaire du Service correctionnel du Canada par rapport aux instructions du ministre, soit d’une volonté de voir le Service correctionnel faire l’objet d’une manipulation politique, ce qui ne serait pas approprié dans un pays démocratique.

[Français]

La Loi sur les mesures d’urgence

L’honorable Claude Carignan : Monsieur le leader, j’ai retracé plus de 11 déclarations dans lesquelles le ministre Mendicino a dit à la population canadienne qu’il avait invoqué la Loi sur les mesures d’urgence sur les conseils et à la demande des forces de l’ordre.

Par exemple, le 28 février 2022, lors de la période des questions à la Chambre des communes, il a dit : « [...] il nous a fallu invoquer la Loi sur les mesures d’urgence et nous l’avons fait selon les conseils professionnels et non partisans des forces de l’ordre ». Il a dit également le 3 mai 2022 : « Nous avons invoqué la Loi sur les mesures d’urgence sur les conseils des forces de l’ordre. » Le 26 avril 2022, au comité mixte, il a dit la même chose. Pourtant, le commissaire de la Police provinciale de l’Ontario a dit ce qui suit :

Je peux vous affirmer que je vous ai dit la vérité absolue; je n’ai jamais demandé que la Loi sur les mesures d’urgence soit invoquée.

Brenda Lucki, commissaire de la GRC, a écrit la même chose. La commissaire a écrit qu’elle estimait que les forces policières n’avaient pas encore épuisé tous les outils à leur disposition. L’ex‑chef de la police d’Ottawa a dit qu’ils n’avaient jamais demandé de recours.

L’ancien surintendant en chef de la Police provinciale de l’Ontario a affirmé la même chose.

Je n’ai plus de mots pour commenter les messages contradictoires du ministre Mendicino. Je ne veux pas nécessairement utiliser les mêmes mots que le sénateur Housakos. Est-ce qu’il y a de l’incompétence? Est-ce que le ministre a vraiment menti à la population de façon aussi répétitive?

Donc, soit cela commence à ressembler à de la mauvaise foi, soit le ministre a menti. Est-ce qu’il ne devrait pas quitter son poste?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : La réponse est non. Premièrement, en ce qui concerne l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence, le rapport a bien établi qu’il était tout à fait justifié. Il est tout aussi vrai que le gouvernement a pris cette décision en ayant pris connaissance de tout un amalgame d’informations, y compris l’information de l’incapacité des forces policières et autres de gérer une situation qui était hors de contrôle, surtout ici, à Ottawa.

Je pense que c’était le sens des déclarations que vous avez citées de la part du ministre Mendicino.

Son Honneur la Présidente : Sénateur Carignan, il vous reste 17 secondes.

Le sénateur Carignan : Monsieur le leader, le problème, c’est qu’il a menti à la Chambre des communes et qu’il a menti à la population. En plus, il y a au pays un nombre jamais vu auparavant de policiers tués en devoir, des fusillades en plein jour, des meurtres gratuits dans les transports publics, dans les parcs, dans les rues, un nombre record de féminicides, un taux de criminalité en hausse... Que fait le ministre? Il hausse les épaules. Nous avons un ministre qui a menti à la Chambre, qui ment à la population et qui, en plus, a montré son incompétence. Qu’attend le premier ministre pour le congédier?

Le sénateur Gold : Je ne vais pas répéter les réponses que j’ai données à plusieurs reprises à la même question. Avec respect, cher collègue, blâmer un ministre ou le gouvernement fédéral pour la montée triste et tragique de la violence partout dans nos villes, dans nos banlieues, dans les juridictions de la police municipale ou provinciale, comme chez nous, à Ottawa, cela dépasse vraiment... Les mots me manquent.

Permettez-moi juste de m’asseoir en silence; cela dépasse la réalité, bien franchement.

[Traduction]

Le Sénat

Hommages aux pages à l’occasion de leur départ

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, cette semaine, nous rendrons hommage aux pages du Sénat qui nous quitteront l’été venu.

Cet automne, Laura Boyd poursuivra ses études en biologie à l’Université Carleton. Elle en sera à sa troisième année. Laura est reconnaissante des deux années pendant lesquelles elle a pu représenter le Manitoba au Sénat et elle s’estime privilégiée d’avoir assisté à de nombreux moments historiques. Elle tient à remercier tous ceux qui ont rendu son expérience inoubliable et elle est reconnaissante à tous ceux qui lui ont permis d’en apprendre un peu plus.

Merci Laura.

Des voix : Bravo!

Son Honneur la Présidente : Tareq Winski se dit honoré d’avoir pu représenter la Colombie-Britannique au sein du Programme des pages du Sénat ces deux dernières années. Il entreprendra sa troisième année en gestion internationale à l’Université d’Ottawa et il espère un jour faire son droit. Le Sénat a fourni à Tareq quantité de souvenirs et d’expériences qu’il chérira à jamais. Il nous remercie chaleureusement pour cette aventure extraordinaire et il tient à remercier l’huissier du bâton noir, ses collègues pages et les estimés sénateurs, sans le soutien et les conseils de qui son passage ici n’aurait pas été aussi enrichissant.

Merci Tareq.

Des voix : Bravo!

Son Honneur la Présidente : Asta Stalker, première page adjointe, a récemment obtenu un baccalauréat ès arts spécialisé en linguistique de l’Université Carleton et se réjouit à l’idée de poursuivre ses études en common law à l’Université d’Ottawa, à l’automne prochain. Asta est reconnaissante d’avoir eu la chance de représenter la Nouvelle-Écosse au sein du Programme des pages du Sénat ces trois dernières années. Elle remercie sincèrement le Bureau de l’huissier du bâton noir, les honorables sénateurs, l’Administration du Sénat et ses collègues pages de lui avoir permis d’apprendre beaucoup ces dernières années et d’avoir rendu cette expérience inoubliable.

Merci, Asta.

Des voix : Bravo!


[Français]

ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur le Mois du patrimoine libanais

Message des Communes

Son Honneur la Présidente annonce qu’elle a reçu de la Chambre des communes le projet de loi S-246, Loi instituant le Mois du patrimoine libanais, accompagné d’un message informant le Sénat qu’elle a adopté ce projet de loi sans amendement.

(1500)

[Traduction]

Recours au Règlement

L’honorable Jane Cordy : J’invoque le Règlement, Votre Honneur. Depuis quelque temps, j’entends de plus en plus souvent des propos non parlementaires résonner entre nos murs, surtout pendant la période des questions. Je trouve inacceptable que des sénateurs traitent leurs collègues et les ministres de menteurs. Ce type de comportement est non parlementaire et il ne devrait pas être toléré. Voilà pourquoi j’invoque le Règlement, Votre Honneur.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : De mon côté, j’estime inacceptable qu’on refuse aux sénateurs de pouvoir appeler un chat un chat. Il y a quelques mois, l’ancien Président nous a dit qu’il était inacceptable qu’on traite quelqu’un de menteur, et nous avons accepté sa décision. Cela dit, Votre Honneur, c’est aussi notre devoir de dire qu’une personne ne dit pas la vérité quand elle a été prise à dire une fausseté. Les sénateurs qui croient que ce n’est pas de notre devoir devraient revoir la liste de leurs responsabilités.

Quand un ministre induit la population en erreur, quand un premier ministre fait de même et tient des propos qui ont été démentis à maintes reprises, savez-vous ce que je trouve non parlementaire, Votre Honneur? C’est qu’on puisse nous reprocher de dénoncer ce genre de chose. Les membres de notre caucus et moi-même allons continuer de faire notre travail, et j’ose espérer que tous les sénateurs ici présents nous accorderont le respect que nous méritons pour avoir fait notre travail.

[Français]

L’honorable Raymonde Saint-Germain : Je pense que pour vous appuyer, Madame la Présidente, dans votre rôle pour soutenir l’ordre et le décorum dans cette Chambre de second regard objectif, d’abord, je suis d’accord avec le recours au Règlement de ma collègue la sénatrice Cordy.

Je crois aussi que nous devons nous inspirer constructivement d’expériences des parlements provinciaux au Canada qui se sont donné des codes, des règles et des index de termes non parlementaires. J’ajouterais même que sur ce plan, nous pouvons suivre l’exemple de la Chambre des communes.

Merci.

L’honorable Pierrette Ringuette : Très brièvement, Madame la Présidente — et je vous remercie de me donner le droit de parole.

Dans le dernier mois, ce n’est pas la première fois qu’un rappel au Règlement sur ce sujet a été porté à l’attention de la présidence. Je crois qu’il y a déjà un rappel au Règlement qui a été entendu et le Président Furey avait rendu sa décision sur le sujet. Peut-être que certains de nos collègues ont oublié cette décision.

Alors, peut-être faudrait-il leur rappeler qu’une décision a déjà été prise et entérinée par l’ensemble de la Chambre. Merci.

L’honorable Claude Carignan : Madame la Présidente, écoutez, on a un droit constitutionnel, comme parlementaires, de dire les vraies choses, de dire les choses, et de dénoncer ce qui doit être dénoncé; c’est notre devoir.

J’ai 11 déclarations provenant d’un individu qui se répète et qui est contredit par toutes les personnes qui devraient le conseiller — soit tous les leaders et les chefs de police — et cela est démontré. Je crois que c’est notre rôle de dire qu’on a été induit en erreur. Je comprends très bien l’objectif du concept de langage non parlementaire, mais un chat est un chat, et on doit utiliser les mots qui correspondent à la réalité.

Si nous sommes limités dans notre pouvoir de parler, dans notre liberté d’expression, dans notre droit de dénoncer ce qui est faux, je pense que cela va amputer notre responsabilité et cela ne rendra pas service à la démocratie. On doit avoir le droit d’exprimer notre opinion et notre jugement; et d’ailleurs, c’est notre obligation de le faire.

[Traduction]

Le sénateur Plett : Votre Honneur, si je pouvais faire un commentaire qui ne concerne pas ce que j’ai fait.

Le sénateur Downe : La Présidente est debout. Assoyez-vous.

Le sénateur Plett : Je suis désolé.

Son Honneur la Présidente : Tout d’abord, d’autres personnes voudront peut-être s’exprimer, mais je pense avoir entendu les arguments soulevés.

Le sénateur Plett : Votre Honneur, je vous en prie. Pour commencer, il n’est pas permis d’invoquer le Règlement pendant les affaires courantes.

La sénatrice Cordy : Sénateur Plett, la Présidente est debout.

[Français]

Décision de la présidence

Son Honneur la Présidente : J’ai entendu assez d’arguments et je suis prête à vous rappeler que l’ancien Président Furey a rendu une décision à ce sujet le 2 mai dernier. J’aimerais vous suggérer de relire sa décision.

Je vais vous la relire pour vous rappeler quelle est la disposition du Règlement à cet égard. Je pense qu’on est suffisamment sage pour être en mesure de l’interpréter.

[Traduction]

Langage non parlementaire

6-13. (1) Les propos injurieux ou offensants sont non parlementaires et contraires au Règlement.

6-13. (2) Lorsqu’un sénateur est rappelé à l’ordre parce qu’il a tenu des propos non parlementaires, tout sénateur peut exiger que ces paroles soient consignées par le greffier.

6-13. (3) Le Sénat prend les mesures disciplinaires qu’il estime indiquées à l’égard du sénateur qui a tenu des propos non parlementaires sans se justifier, se rétracter ou présenter des excuses jugées satisfaisantes par le Sénat.

Il faut se rappeler ce qu’est le langage non parlementaire.

[Français]

Les travaux du Sénat

Son Honneur la Présidente : Conformément à l’ordre adopté le mardi 13 juin 2023, je quitte le fauteuil pour que le Sénat se forme en comité plénier afin de recevoir Mme Harriet Solloway relativement à sa nomination au poste de commissaire à l’intégrité du secteur public. L’honorable sénatrice Ringuette présidera le comité.

La commissaire à l’intégrité du secteur public

Réception de Harriet Solloway en comité plénier

L’ordre du jour appelle :

Le Sénat en comité plénier afin de recevoir Mme Harriet Solloway relativement à sa nomination au poste de commissaire à l’intégrité du secteur public.

(La séance est suspendue et le Sénat se forme en comité plénier sous la présidence de l’honorable Pierrette Ringuette.)


La présidente : Honorables sénateurs, le Sénat s’est formé en comité plénier afin de recevoir Mme Harriet Solloway relativement à sa nomination au poste de commissaire à l’intégrité du secteur public.

Honorables sénateurs, pendant un comité plénier, les sénateurs s’adressent à la présidente, mais ne sont pas obligés de se lever. Conformément au Règlement, le temps de parole est de 10 minutes — questions et réponses y comprises — mais, tel qu’il est ordonné, si un sénateur n’utilise pas tout son temps de parole, il peut céder le temps qu’il lui reste à un autre sénateur. Le comité accueillera Mme Harriet Solloway, candidate proposée au poste de commissaire à l’intégrité du secteur public, et je l’invite maintenant à nous rejoindre.

(Conformément à l’ordre adopté par le Sénat, Harriet Solloway prend place dans la salle du Sénat.)

La présidente : Madame Solloway, j’ai le plaisir de vous accueillir au Sénat. Je vous invite à faire vos observations préliminaires d’au plus cinq minutes.

(1510)

[Traduction]

Harriet Solloway, candidate proposée au poste de commissaire à l’intégrité du secteur public : Je vous remercie, honorables sénateurs, de me donner la possibilité de vous rencontrer aujourd’hui et d’avoir accepté d’étudier ma nomination. Je vous en suis très reconnaissante.

Tout au long de ma carrière internationale, j’ai toujours montré mon attachement à la primauté du droit, à l’équité procédurale et à l’accès à la justice. Dans le contexte de la fonction publique, il doit y avoir un endroit sûr où les fonctionnaires peuvent se faire entendre lorsqu’ils ont des préoccupations qui, si elles restent sans suite, pourraient ébranler la confiance du public et compromettre l’intégrité du secteur public, en plus de miner les conditions de travail des fonctionnaires dévoués et de nuire à la qualité des services offerts à la population canadienne.

Le rôle du commissaire à l’intégrité du secteur public est crucial, car il doit faire en sorte que les organismes visés par la loi aient et conservent la confiance du public. Le commissaire est le gardien de l’équité procédurale, y compris pour les divulgateurs d’actes répréhensibles, les personnes soupçonnées d’actes répréhensibles et celles qui prennent part au processus, et il a pour grands objectifs de promouvoir une culture de la fonction publique fondée sur l’éthique et de faire la lumière sur les actes répréhensibles mineurs qui ont lieu dans le secteur public fédéral.

Que ce soit en raison du projet de loi C-290 ou du groupe de travail externe chargé de réviser la loi et d’étudier les 15 recommandations figurant dans le rapport publié en 2017 par le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires, le Commissariat à l’intégrité du secteur public du Canada est à un moment charnière de son histoire. Le groupe de travail pourra compter sur ma collaboration et je suis impatiente de travailler à la mise en œuvre de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles et des modifications qui pourraient y être apportées.

[Français]

Ma carrière inclut des expériences dans les domaines des relations de travail, du droit et de la gestion, tant à l’échelle nationale qu’internationale. J’ai notamment travaillé plus de 22 ans à titre de cadre supérieure dans le secteur public international au sein de la Cour pénale internationale, des Nations unies et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.

En tant que pionnière dans la gestion de programmes visant à reconstruire et à transformer les systèmes judiciaires dans des circonstances difficiles, j’ai dirigé avec succès de nombreux efforts stratégiques ainsi que des efforts de gestion du changement. Ces compétences me seront très utiles pour guider le commissariat dans la mise en œuvre de tous les changements résultant des modifications potentielles à la législation existante.

[Traduction]

Dans le cadre de divers postes, notamment en tant que conseillère juridique dans des zones de conflits comme le Kosovo et la République centrafricaine, ainsi qu’en tant que directrice responsable de la primauté du droit en République démocratique du Congo, j’ai supervisé la production de rapports sur les droits de la personne en m’assurant de l’exactitude des allégations fondées sur des éléments de preuve tout en considérant d’autres facteurs comme les mesures de protection des témoins et des informateurs ainsi que les effets possibles sur la sécurité en général dans la région.

[Français]

Je possède une vaste expérience internationale dans l’élaboration et la mise en œuvre d’enquêtes et de stratégies visant à lutter contre les crimes et les violations graves des droits de la personne.

En tant que conseillère juridique en matière de crimes sexuels au Tribunal pénal international pour le Rwanda, j’ai dirigé l’enquête qui a conduit à la première condamnation pour des crimes sexuels dans un tribunal international, soit l’affaire Akayesu. En République démocratique du Congo, j’ai collaboré avec les autorités nationales, les partenaires internationaux, les ONG et les communautés pour créer et mettre en œuvre un programme novateur, les Cellules d’appui aux poursuites, visant à apporter un soutien international aux enquêtes congolaises sur les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis par le service national en uniforme.

Au cours de ma carrière, j’ai enquêté sur des crimes, défendu des accusés et monté des dossiers pour l’accusation dans le cadre de procédures pénales. J’ai travaillé à la protection des témoins et j’ai participé au développement des capacités des juges et des enquêteurs. Toutes ces expériences me permettent d’être réellement neutre, impartiale et juste envers tous.

Si ma nomination est confirmée, mon expérience dans la conduite de nombreux processus complexes de gestion de changement, ainsi que l’attention particulière que je porte à la protection de toutes les parties, constitueraient le fondement des approches privilégiées par le commissariat.

[Traduction]

Enfin, les fonctionnaires dévoués ont droit à un milieu de travail où ils peuvent se sentir en sécurité et faire leur travail avec fierté. Je m’engage entièrement à faire la lumière sur les actes répréhensibles et à favoriser la confiance et l’éthique au sein de la fonction publique au nom du personnel des 134 institutions gouvernementales assujetties à la loi et de la population canadienne. Merci.

La présidente : Merci, madame Solloway.

Pour la première période de 10 minutes, le sénateur Plett a la parole.

Le sénateur Plett : Merci, madame la présidente. Je vous souhaite la bienvenue, madame Solloway. Je vous félicite de votre nomination. Pourriez-vous expliquer brièvement le processus qui vous a menée jusqu’ici aujourd’hui? Avez-vous présenté votre candidature pour ce poste, ou vous a-t-on demandé de le faire? Pourquoi avez-vous proposé votre candidature? Qui vous a fait passer l’entrevue, et quel examen avez-vous passé?

Mme Solloway : Je vous remercie de votre question. Le processus a commencé lorsque j’ai consulté le site Web du gouverneur en conseil qui affiche tous les postes disponibles, ou, du moins, c’est ma compréhension de la chose. Très franchement, cela faisait plusieurs années que je cherchais un poste, car j’avais envie de revenir au Canada pour exercer une charge publique.

Lorsque j’ai vu ce poste, j’ai postulé en ligne. C’était probablement en novembre ou en décembre de l’année dernière. J’ai ensuite été convoquée à un examen et je l’ai passé. Je ne me souviens pas de la date exacte. Puis, plusieurs semaines après l’examen, j’ai été convoquée à une entrevue. Il y avait un groupe d’évaluateurs. Je ne me souviens pas de toutes les personnes qui en faisaient partie. Je me souviens qu’il y avait un expert en éthique de l’une des universités. À part cela, je ne me souviens pas de l’identité des membres du groupe.

Il se peut que je me souvienne mal du moment, mais il y a à peu près deux mois, j’ai reçu une invitation à un entretien avec la ministre Fortier. Nous avons parlé pendant environ 10 minutes. Elle appelait de l’aéroport et j’étais en vacances. J’ai eu l’impression qu’elle cherchait à évaluer mes compétences en français et à savoir un peu qui j’étais. Comme je l’ai dit, la conversation a duré une dizaine de minutes, c’est tout.

J’ai posé ma candidature parce que, depuis plusieurs années, je souhaitais revenir au Canada et je cherchais un poste où je pensais pouvoir apporter ma contribution. Ce poste répond certainement à ce critère, et je suis ravie que ma candidature ait été retenue. Merci.

Le sénateur Plett : Je vous remercie de cette réponse détaillée. Comme vous l’avez dit, vous avez passé une grande partie de votre carrière à l’étranger, notamment au Kosovo, à Vienne, à La Haye et à New York. Que pensez-vous, madame Solloway, de la fonction publique canadienne, et comment vos expériences de travail internationales influencent-elles ce point de vue?

Mme Solloway : Eh bien, je peux simplement dire que mon impression de la fonction publique canadienne est probablement semblable à celle qui existe à l’échelle internationale, puisque j’ai en effet travaillé à l’étranger à partir de 1996. Le monde a généralement une impression très positive de la fonction publique canadienne et du Canada. Pour ce qui est de mon point de vue, je dirais que je suis fière d’être Canadienne et que, si je suis choisie, je serai fière de faire partie de cette organisation.

Le sénateur Plett : Je vous remercie. Je suis convaincu que cette rencontre se passera bien, tout comme le suivi.

Si vous devenez la nouvelle commissaire à l’intégrité du secteur public, que ferez-vous pendant les 100 premiers jours où vous serez en poste? Sur quelles priorités vous concentrerez-vous si votre nomination est approuvée?

Mme Solloway : Au cours de ma carrière, j’ai occupé certains postes de niveau supérieur. S’il y a une chose que l’expérience m’a apprise, c’est qu’il est très important d’écouter. J’écouterais le personnel de la commission, ainsi que les intervenants importants. Je me familiariserais avec l’examen en cours, ainsi qu’avec l’état d’avancement du projet de loi d’initiative parlementaire. Je m’assurerais simplement de bien connaître tous les aspects du dossier.

Je sais que certaines personnes qui arrivent dans un poste supérieur promettent qu’elles vont faire telle ou telle chose. Je pense vraiment qu’il est malavisé d’agir à la hâte avant d’avoir une bonne compréhension de l’organisation. Ainsi, pendant mes 100 premiers jours, je m’emploierai à acquérir cette compréhension.

Le sénateur Plett : Le Canada est loin d’être parfait en ce qui concerne la protection des fonctionnaires qui ont divulgué des actes répréhensibles. L’Association internationale du barreau et l’organisme Government Accountability Project ont publié en janvier dernier une étude qu’ils ont menée. Le Canada est en dernière place, à égalité avec le Liban et la Norvège. On a particulièrement critiqué le très faible nombre de cas qui ont été renvoyés à un tribunal. La Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles est entrée en vigueur en avril 2007. Nous avons eu 16 ans pour déterminer ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.

(1520)

Je suis certain que vous savez qu’en ce moment, le Parlement est saisi d’un projet de loi visant à modifier cette loi. À votre avis, quelles sont les lacunes? Que devrions-nous faire pour mieux protéger les dénonciateurs des représailles?

Mme Solloway : Je vous remercie à nouveau de votre question. Comme je l’ai dit dans ma réponse précédente, je ne suis pas en mesure pour l’instant de dire ce qu’il faut faire, ce qui cloche et pourquoi. Je dois vraiment prendre le temps d’en apprendre davantage. J’ai lu les rapports dont vous avez parlé ainsi que d’autres commentaires, mais je ne crois pas qu’il serait prudent pour moi de me prononcer avant d’avoir mieux compris le fonctionnement de la commission.

Le sénateur Plett : Au cours des trois derniers exercices, le Commissariat à l’intégrité du secteur public a atteint ou dépassé ses normes de service dans tous les domaines, à une exception près. Il a pour objectif annuel de mener à bien 80 % de ses enquêtes en un an ou moins. Ce chiffre était de 44 % pour l’exercice de 2021-2022 et de 50 % pour l’année dernière, ce qui n’est guère mieux.

Quels sont vos plans? Avez-vous l’intention d’augmenter le nombre de cas traités par le commissariat en un an? Comment cela s’inscrirait-il dans vos 100 premiers jours?

Mme Solloway : Monsieur le sénateur, je crains encore une fois de ne pas être en mesure de répondre. Il faudrait que j’aie une connaissance plus intime de l’organisme pour pouvoir cerner les problèmes potentiels. Une fois que ce sera le cas, je serai mieux à même de donner mon avis.

Je regrette vraiment de ne pas être en mesure, à ce stade, de fournir des avis et des conseils sur la question que vous soulevez.

Le sénateur Plett : Très bien. Merci. Madame la présidente, j’ai terminé. Je cède le reste de mon temps de parole aux autres groupes.

La présidente : Les 10 prochaines minutes sont pour le Groupe des sénateurs indépendants, ce qui veut dire cinq minutes pour la sénatrice Pate et cinq pour le sénateur Dean.

La sénatrice Pate : Soyez la bienvenue, madame Solloway. En 2020, votre prédécesseur a constaté l’existence de comportements manifestement illégaux de la part d’employés du Service correctionnel du Canada, signe de problèmes systémiques alarmants. Outre l’insubordination et le harcèlement, il a constaté que certains affichaient du contenu raciste, empêchaient des collègues de donner leurs médicaments aux détenus — en tout cas dans au moins un centre de santé mentale —, dénigraient le travail des autres ou abandonnaient carrément leur poste. Il a aussi constaté qu’il ne s’agissait pas d’incidents isolés, mais bien de problèmes systémiques découlant d’une très mauvaise gestion. Il en a résulté un milieu de travail où un groupe d’agents correctionnels a poussé l’audace jusqu’à l’insubordination et a agi en toute impunité, sans qu’il y ait de conséquences, ou si peu.

L’incurie du Service correctionnel du Canada a exposé employés et détenus à de graves dangers, y compris pour leur vie, leur santé ou leur sécurité au sens de l’alinéa 8d) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles.

Votre prédécesseur a recommandé une série de mesures, mais ces mesures ne semblent avoir eu à peu près aucun effet sur la culture de racisme, de misogynie, d’abus de pouvoir et de mauvaise gestion qui règne au Service correctionnel du Canada. Nous savons que ce genre de chose se produit aussi dans d’autres ministères. Comment prévoyez-vous corriger les problèmes au sein du Service correctionnel du Canada et dans le reste de l’appareil gouvernemental?

Mme Solloway : Tout d’abord, ce que vous décrivez est très perturbant pour n’importe qui. J’ai passé une grande partie de ma carrière à m’intéresser aux services correctionnels d’autres pays.

Pour ce qui est de ce que je ferais dans ce cas-ci, le mandat de la commissaire est très précis. Il est nécessaire de s’en tenir à ce mandat. Pour ce qui est des mesures que je pourrais prendre, encore une fois, tant que je ne serai pas entrée en fonction, et tant que je ne saurai pas comment les choses peuvent être mises en œuvre, il serait prématuré, à ce stade-ci, de dire ce que je ferais. Je peux vous dire que je serais prête à faire tout ce qui est en mon pouvoir, qui relève de ma compétence, et qui est autorisé par la loi. Ces conditions sont manifestement inacceptables.

La sénatrice Pate : Compte tenu de l’expérience que vous avez acquise dans d’autres pays, quels types de mesures pourraient être employées pour lutter contre les représailles exercées par les autorités correctionnelles à l’encontre de leurs collègues, de leurs subordonnés et des détenus dont le Canada pourrait s’inspirer et qui pourraient vous être utiles dans le cadre vos fonctions futures?

Mme Solloway : Madame la sénatrice, chaque contexte est unique. Les problèmes présents au Congo, par exemple, n’ont rien à voir avec ceux qui le sont au Canada. Au Congo, les structures gouvernementales et autres sont bien différentes de celles du Canada.

Je ne crois pas pouvoir tracer un parallèle direct ni tirer des leçons de ce qui s’est fait au Congo en vue de l’appliquer au Canada.

Je sais qu’on dirait que je veux éviter de répondre, mais je pense qu’il est nécessaire que je ne m’avance pas trop avant d’avoir bien compris ce que le titulaire du poste serait en mesure de faire dans un tel contexte.

La sénatrice Pate : Alors, d’après l’expérience que vous avez acquise dans d’autres contextes, quelles sont selon vous les meilleures approches que vous pourriez mettre en œuvre à titre de commissaire pour répondre aux cas de représailles et régler les problèmes du genre de ceux dont j’ai parlé au sein de la fonction publique?

Mme Solloway : Encore une fois, je crois que le rôle du commissaire à l’intégrité de la fonction publique est bien précis et que le titulaire du poste doit respecter des paramètres, qui font présentement l’objet d’un examen.

Je ne voudrais pas mettre la charrue devant les bœufs et m’avancer sur ce que je ferais alors que je ne suis pas encore rendue là. Encore une fois, j’espère pouvoir vous voir de nouveau, ce qui arrivera probablement si je suis nommée. Je vous donnerai mon avis sur certaines de ces questions avec plaisir, mais pour l’instant, je ne crois pas être en position de le faire.

Le sénateur Dean : Merci, madame Solloway, de vous joindre à nous aujourd’hui. Je profite de l’occasion pour vous féliciter de vos nombreuses réalisations professionnelles, des services rendus aux Canadiens et, bien sûr, aux ressortissants des pays où vous avez été en poste et où la tâche n’a pas été de tout repos.

Vous aurez pour mandat d’enquêter sur des actes répréhensibles au sein de la fonction publique fédérale, y compris à la GRC et certaines sociétés d’État. Il s’agit d’un rôle très important. Le rapport annuel du commissariat indique qu’il reste du travail à faire pour que les organismes du secteur public demeurent des milieux de travail sains et sécuritaires.

De façon générale — je ne demande pas de détails —, pouvez‑vous indiquer deux ou trois grandes priorités que vous auriez en début de mandat, notamment en ce qui concerne le commissariat et les organismes clients? À cet égard, je songe aux priorités que vous aviez établies lorsque vous avez été en fonctions dans divers organismes dans le passé et qui pourraient orienter votre démarche dans vos nouvelles fonctions. Je ne demande pas de réponse très précise. D’après vous, quels sont les principaux défis qui se posent au commissaire à l’intégrité?

Troisièmement, envisagez-vous de rencontrer le greffier du Conseil privé, les sous-ministres et les dirigeants d’organismes à un moment donné, tant pour faire part de votre philosophie et de vos priorités que pour entendre le point de vue des clients du commissariat?

Mme Solloway : Pour ce qui est de deux ou trois priorités, j’en ai mentionné quelques-unes au début, notamment la consultation des divers intervenants et du personnel du commissariat. J’estime important de connaître leur point de vue sur le fonctionnement du commissariat et d’en tenir compte dans les plans d’avenir.

Ma deuxième priorité serait de collaborer avec le comité indépendant qui a été mis sur pied pour examiner la loi; je m’emploierais à en appuyer et à en faciliter le travail dans toute la mesure du possible. Je crois que ce sont les deux ou trois priorités qui me guideraient au départ.

Pour ce qui est des défis, d’après mon expérience dans le secteur public à l’échelle internationale — et j’imagine que c’est la même chose ici —, une fois qu’une décision est prise au sujet de ce qu’il faut faire, il y a généralement de l’impatience au sujet du délai de mise en œuvre. Il sera donc essentiel d’indiquer et d’expliquer où nous en sommes — et pourquoi — dans la réalisation des objectifs fixés. Il faudra aussi veiller à ce que les principaux intervenants le comprennent.

(1530)

Je crois fermement qu’il faut poser des assises solides avant de passer à l’action. Les gens s’intéressent davantage au produit fini qu’au travail qui a permis de l’obtenir. Par le passé, j’ai dû faire en sorte que les gens comprennent que, même si cela ne semblait pas toujours le cas, les choses progressaient et que leur attente serait récompensée quand le projet serait achevé, car il reposerait sur des bases solides. C’était là le défi.

Le sénateur Dean : En ce qui concerne les grandes organisations, y compris celles du secteur public, nous savons, d’après les rapports du commissariat, que des préoccupations sont parfois soulevées et que des allégations sont formulées à l’endroit de cadres supérieurs au sein de certaines de ces organisations, notamment au niveau de la direction.

Lorsqu’il s’agit d’apporter des changements à des organisations, y compris à leur culture, quelle est la part de responsabilité de la personne à la tête de la fonction publique? Quelle est la part de responsabilité des sous-ministres? Quelle est celle des organismes de surveillance qui ont souvent la possibilité d’encourager un changement de culture, ainsi que de proposer des idées, d’offrir des réflexions et de formuler des recommandations à ce sujet?

Mme Solloway : Merci. Il y a, malheureusement, une différence entre un changement organisationnel et un changement de culture. Très souvent, les organisations se trouvent dans une position où elles doivent changer pour répondre aux besoins du moment. Dans ce cas-ci, en fonction des résultats du travail du comité et du débat sur le projet de loi, un changement pourrait s’imposer parce que la loi pourrait être modifiée. Il faut suivre ce qui est indiqué. C’est une mécanique précise, qui est plus facile à gérer qu’un changement de culture.

Pour ce qui est de la responsabilité d’un changement de culture, à mon avis, tous les membres de la fonction publique en sont responsables — du premier au dernier échelon et à tous les niveaux. Nous sommes tous concernés parce que la culture de l’organisation nous touche tous, sans oublier que nous devons tous rendre des comptes à la population canadienne. Je ne crois pas qu’un bureau soit plus responsable qu’un autre. Si tout le monde fait son travail de façon honorable, en général, le changement de culture s’opère.

Le sénateur Tannas : Je vous remercie beaucoup de votre présence. Félicitations pour votre brillante carrière et merci pour vos années de service.

Je voudrais revenir sur la question des 50 % de cas qui sont résolus dans les délais prévus et des 50 % qui ne le sont pas. Le commissaire sortant a attribué cette situation à des contraintes liées à la pandémie, mais il a également parlé de la difficulté d’obtenir dans un délai raisonnable les documents fournis par des fonctionnaires du gouvernement. C’est une tendance qui ressort dans les rapports récents de divers mandataires du Parlement — notamment dans le rapport publié cette semaine par la commissaire à l’information —, à qui on ne fournit tout simplement pas l’information demandée en temps opportun.

Je m’attends à ce que vous puissiez vous appuyer sur une grande expérience, mais j’aimerais que vous m’expliquiez comment vous allez affirmer votre rôle de commissaire à l’intégrité du secteur public pour que les hauts fonctionnaires comprennent bien votre rôle de mandataire du Parlement. Que pouvons-nous faire pour vous aider à assumer ce rôle?

Mme Solloway : Je vous remercie. La réponse, encore une fois, n’est pas ce que je pourrais faire une fois devenue commissaire, parce que je ne le sais pas encore. Une fois en poste, je me pencherais sur les pratiques et les paramètres juridiques pour voir ce que je peux faire.

Lorsque vous demandez ce que vous pouvez faire pour aider, en tant qu’employé de la fonction publique, c’est de la musique à mes oreilles, car il est tout à fait vrai que la base législative d’un mandat définit les limites de ce que le titulaire d’un poste peut faire.

Je dirais — et je suis désolée de me répéter — qu’à ce stade-ci, je l’ignore. Je me réjouis que l’on y réfléchisse, mais pour l’instant, je serais heureuse de revenir sur la question, si ma nomination est confirmée, et de vous donner une réponse plus complète lorsque j’aurai mieux compris quels sont les paramètres.

Le sénateur Tannas : Pourriez-vous confirmer que vous n’hésiteriez pas à revenir nous demander de l’aide si vous en aviez besoin?

Mme Solloway : Eh bien, absolument — je répète que je ne suis pas certaine des paramètres qui régissent ce que j’ai le droit et ce que je n’ai pas le droit de faire, mais si c’est permis, bien sûr.

Le sénateur Tannas : Merci.

Récemment, une étude menée auprès de groupes de discussion formés de fonctionnaires fédéraux a révélé que seulement la moitié des fonctionnaires avaient déjà entendu parler du Commissariat à l’intégrité du secteur public du Canada. Dans les postes que vous avez occupés, avez-vous déjà été dans une situation où vous avez dû mieux faire connaître votre rôle au sein d’une organisation qui n’était pas au courant de l’existence de ce rôle? Est-ce que cela vous est déjà arrivé et pourriez-vous nous en fournir un exemple?

Mme Solloway : Je vous remercie. Ce n’était pas tant au sein de l’organisation, mais, à titre d’exemple, lorsque j’étais au Congo et que j’ai été embauchée pour aider les Congolais à reconstruire leur système de justice, les Congolais n’avaient aucune idée de mon existence. La sensibilisation s’est faite par l’entremise de mes homologues et collègues congolais — certains sont devenus des collègues au fil du temps parce que nous avons travaillé en étroite collaboration pendant plusieurs années. C’est ce que j’ai fait, mais il est important de faire des démarches pertinentes. L’une des choses pour lesquelles j’ai aidé les Congolais, parce qu’il était important que la population comprenne le travail accompli pour améliorer les choses, a été de les soutenir dans leurs efforts pour avoir une couverture médiatique, par exemple. En outre, il était important d’obtenir du soutien sur l’échiquier mondial en sensibilisant les États membres des Nations unies sur les réalisations des Congolais.

Je les ai appuyés concrètement dans leurs efforts, mais pas spécifiquement au sein de mon organisation.

Le sénateur Tannas : Êtes-vous de ces personnes qui pensent que « ce qui peut être mesuré peut être géré », par exemple la tranche de 50 % des fonctionnaires qui ne sont pas au courant? Est‑ce une mesure pour laquelle vous voudriez faire un suivi annuel ou à intervalles réguliers? Êtes-vous de ces gestionnaires qui ont besoin de trouver des méthodes pour savoir s’ils sont sur la voie du succès?

Mme Solloway : Je crois beaucoup en deux choses : la première, ce sont les données. Aujourd’hui, nous disposons de bon nombre de possibilités et d’outils pour nous aider à collecter des données, et je crois beaucoup aux données. Je pense que cela répond en partie à votre question.

Je crois aussi — et pardonnez la paraphrase, car je ne me souviens pas de la phrase exacte, car on m’a dit il y a longtemps que Nelson Mandela avait dit cela — que ce n’est pas tout ce qui peut être compté qui compte et que ce n’est pas tout ce qui compte qui peut être compté. Il y a aussi des aspects intangibles — lorsque vous travaillez dans un organisme, du secteur public ou autre — qui ne peuvent pas être comptés, mais qui peuvent aussi être très pertinents. Je crois beaucoup à ces deux éléments.

Le sénateur Tannas : Ma dernière question est la suivante : Ian Bron, professeur à l’Université Carleton, a étudié en profondeur le régime de protection des dénonciateurs au Canada. Il constate qu’il existe un manque de confiance important entre la fonction publique fédérale et le Commissariat à l’intégrité. Il a eu l’audace de souligner que beaucoup considèrent que le commissaire sert davantage le gouvernement qu’il ne protège les dénonciateurs, ce qui a probablement beaucoup à voir avec le fait que nous ayons terminé en dernière position dans l’enquête sur les 50 pays.

(1540)

Comment envisagez-vous d’améliorer la situation et de donner le ton au cours de vos 100 premiers jours? Il y aura des attentes. Vous dites que vous allez écouter, mais l’écoute ne donne pas nécessairement le ton. Peut-être que si. Pourriez-vous nous en dire plus?

Mme Solloway : Je vous remercie. Je pense que l’écoute est la première étape pour donner le ton, car, lorsque les gens n’ont pas l’impression d’être entendus, ils n’ont généralement pas confiance. Tout commence par l’écoute au cours des 100 premiers jours, mais il ne suffit pas d’écouter. Il faut ensuite démontrer que le fait d’avoir écouté a changé les choses ou a eu des retombées. La poursuite de la communication après cela est également essentielle. Ce n’est pas seulement au cours des 100 premiers jours qu’il faut établir ce type de dialogue.

Je poursuivrai ce dialogue à l’issue des 100 premiers jours. Je pense qu’il faut commencer par cela pour donner le ton. Il faut un certain temps pour que les gens fassent confiance. C’est compréhensible face à toute nouvelle personne qui entre en fonction. Je crois que je peux le faire et j’espère gagner cette confiance.

Le sénateur Tannas : Nous vous remercions. Bonne chance dans vos fonctions, et n’oubliez pas que nous sommes là pour vous aider si vous en avez besoin.

La présidente : Nous passons maintenant à la prochaine période de 10 minutes, qui sera partagée également entre la sénatrice Cordy et le sénateur Cardozo.

La sénatrice Cordy : Je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada, madame Solloway. Nous sommes heureux de vous accueillir.

Madame Solloway, pour faire enquête sur des actes répréhensibles, la personne qui occupe le poste de commissaire à l’intégrité du secteur public doit s’appuyer uniquement sur les déclarations des fonctionnaires et du public. Cependant, les fonctionnaires ne se manifesteront pas à moins d’avoir l’assurance d’être protégés contre les représailles. Selon la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, il faut mettre en place de telles mesures de protection. Or, nous avons appris que les travailleurs fédéraux sont de plus en plus sceptiques par rapport au processus de divulgation des actes répréhensibles à la fonction publique, et qu’ils craignent davantage de faire l’objet de représailles, au lieu de recevoir de l’aide, s’ils dénoncent ce qui se passe.

J’aimerais donc vous poser la question suivante. Si le Commissariat à l’intégrité du secteur public a un rôle à jouer à ce chapitre, comment, selon vous, pourrait-il favoriser la confiance à l’égard du processus de plainte afin que les fonctionnaires puissent dénoncer les actes répréhensibles sans craindre les représailles?

Vous avez dit au sénateur Tannas que les gens n’ont pas confiance lorsqu’ils n’ont pas l’impression d’être entendus; je crois que ce sont les mots que vous avez employés. Selon vous, comment peut-on s’assurer que les fonctionnaires auront l’impression d’être entendus en faisant part de leurs préoccupations?

Mme Solloway : Je vous remercie. Il n’est pas rare que la méfiance règne face à des actes répréhensibles, en particulier si l’acte répréhensible présumé est commis par un cadre supérieur de l’organisation. J’ajouterais que de tels actes peuvent être commis à tous les échelons. Là encore, il nous faut être attentifs et communiquer. Il n’y a rien de pire que de déposer une plainte ou de soulever un problème et de ne recevoir aucune réponse, sauf peut-être : « Nous avons reçu votre courriel. Merci beaucoup. » Rien n’est pire que cela.

Je veillerais à ce que les personnes qui se manifestent soient tenues informées à intervalles raisonnables. Ce ne sera pas nécessairement tous les jours ou toutes les semaines, mais nous déterminerions ce qui constitue un intervalle raisonnable pour que les gens sachent à quoi s’attendre. Nous pourrions leur dire que nous allons communiquer avec eux dans un certain délai, quel qu’il soit. Au moins, ces personnes sauraient que leur problème n’a pas été simplement mis sur une pile et oublié.

Cela ne changerait peut-être pas la vitesse à laquelle il est possible de s’occuper d’un cas. Je ne le sais pas encore. Encore une fois, je ne suis pas encore en poste, mais la communication est essentielle.

La sénatrice Cordy : Merci beaucoup de votre réponse. Le rapport qui a mis en évidence un déclin dans la confiance que le processus de plaintes inspire aux fonctionnaires révèle aussi qu’environ la moitié des personnes qui ont participé aux groupes de discussion à l’origine du rapport ne savaient pas qu’il existe un Commissariat à l’intégrité du secteur public. Cela pose un grand défi, mais avez-vous réfléchi à ce qui pourrait être fait pour rectifier la situation? Je sais que vous avez déjà parlé, dans vos réponses précédentes, de l’importance cruciale de la communication, mais peut-être pourriez-vous nous en dire davantage.

Mme Solloway : Merci. La communication est d’une extrême importance. Quelle forme prendrait-elle dans ce contexte précis? Il est trop tôt pour le dire. Je ne sais pas quels moyens on utilise actuellement pour communiquer avec les fonctionnaires. Il y a trop d’éléments que je ne connais pas pour pouvoir dire, avec précision, ce que je ferais. Cela dit, je chercherais des voies de communication qui permettraient de joindre le plus de gens possible. Leur mise en œuvre prendrait peut-être un certain temps, mais ce serait l’un des objectifs.

La sénatrice Cordy : Merci.

Le sénateur Cardozo : Madame Solloway, félicitations pour votre nomination. Je veux vous féliciter d’avoir posé votre candidature. De nos jours, ce n’est pas toujours une bonne idée ou souhaitable d’accepter un poste en vue. C’est pourquoi il est d’autant plus important que des gens qui possèdent votre expérience acceptent de le faire.

[Français]

Je vais commencer avec une question de juridiction. Selon vous, quelle est la ligne de démarcation entre les enquêtes que vous mèneriez et celles de la Commission canadienne des droits de la personne? Je songe à des cas où il y a des problèmes généraux dont une partie est liée au racisme ou au sexisme systémiques.

Mme Solloway : Merci, monsieur le sénateur. Encore une fois, je dirais que les paramètres de chaque rôle devraient être et sont définis dans les lois existantes. Toutes les mesures adoptées par la Commission canadienne des droits de la personne ou le Commissariat à l’intégrité du secteur public du Canada devraient être et sont définies dans la loi. S’il y a un chevauchement, à ce moment-là, c’est une question de pratiques.

Étant donné que je ne suis pas encore suffisamment au fait du fonctionnement sur le terrain, je crois qu’il serait prématuré pour moi de me prononcer à ce sujet.

[Traduction]

Ma référence est toujours la lettre de la loi, ainsi que le libellé et l’intention de celle-ci. Là où il y a des ambiguïtés, il faut demander des précisions aux autorités compétentes.

Le sénateur Cardozo : Merci. Pourriez-vous nous dire, d’un côté, de quelle manière vous protégerez les dénonciateurs — c’est ce que nous souhaitons que vous fassiez —, mais, de l’autre côté, ce qui arriverait si le dénonciateur a contrevenu à la loi canadienne, en ce qui a trait au secret ou autrement, et que la personne fait manifestement quelque chose qui semble illégal?

Mme Solloway : Comme je l’ai dit, ma référence est toujours la loi. Je vais toujours être guidée par la loi. Je vais toujours être guidée par l’application régulière de la loi. Je crois que pour toutes les parties prenantes au processus, qu’il s’agisse du dénonciateur, de la personne qui pourrait être accusée d’avoir mal agi ou de celles qui pourraient être touchées d’une façon ou d’une autre, l’important c’est que tout le monde comprenne qu’il y aura un processus équitable, qu’on appliquera la loi et que leurs droits seront respectés, tout en respectant l’application de la loi pour tous. C’est la meilleure façon de procéder.

Tel que je le comprends, le rôle de commissaire à l’intégrité du secteur public ne consiste pas à appliquer la loi. Il existe différents rôles définis pour différentes institutions, et les responsabilités seraient partagées en conséquence.

Le sénateur Cardozo : Merci. Savez-vous si votre commission peut lancer des enquêtes? Je songe à l’exemple mentionné par la sénatrice Pate. Existe-t-il des domaines où il y a un problème flagrant, au sujet desquels vous entendez beaucoup de choses, sans toutefois que la moindre plainte ait été portée?

(1550)

Mme Solloway : Je vous remercie pour votre question. Mes connaissances se limitent à ce que j’ai lu, et je crois comprendre actuellement — qu’on me corrige si je me trompe — que le commissariat ne fait pas cela. Je ne sais pas si l’on envisage de le faire, mais j’ai cru comprendre — peut-être à tort — que ce n’est pas le cas en ce moment.

Le sénateur Cardozo : Pourriez-vous nous donner une idée générale des aspects de votre expérience antérieure qui font de vous une bonne candidate pour ce poste? J’ai cru comprendre que vous aviez mené des enquêtes de toutes sortes. Serait-ce le principal domaine dans lequel vous avez de l’expérience liée à ce poste?

Mme Solloway : C’est certainement l’un d’entre eux. Deux de mes points forts sont que j’ai géré des équipes dans la fonction publique et que je comprends également la dynamique complexe de la fonction publique, je pense donc qu’ils me serviront bien ici.

Mon expérience juridique sera également très utile, tout comme mon expérience en matière de relations de travail, que je n’ai pas vraiment mise en évidence, même si elle remonte à bien des années. Mon expérience est très variée et comprend de nombreux aspects différents qui pourraient être pertinents pour ce poste. De plus, lorsque j’ai examiné la législation, la loi et certains des rapports qui ont été faits, je me suis sentie très à l’aise de postuler pour ce poste. Je ne me serais pas portée candidate à un poste dont je ne pensais pas pouvoir remplir les fonctions aisément, et je pense donc que c’est vraiment la somme de mon expérience.

La présidente : Honorables sénateurs, le comité siège maintenant depuis 45 minutes. Conformément à l’ordre adopté par le Sénat, je suis obligée d’interrompre les délibérations afin que le comité puisse faire rapport au Sénat.

Madame Solloway, au nom de tous les sénateurs, je vous remercie de vous être jointe à nous aujourd’hui.

Des voix : Bravo!

La présidente : Honorables sénateurs, êtes-vous d’accord pour que la séance du comité soit levée et que je déclare au Sénat que la témoin a été entendue?

Des voix : D’accord.


Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, le Sénat reprend sa séance.

[Français]

Rapport du comité plénier

L’honorable Pierrette Ringuette : Honorables sénateurs, le comité plénier, qui a été autorisé par le Sénat à recevoir Mme Harriet Solloway relativement à sa nomination au poste de commissaire à l’intégrité du secteur public, signale qu’il a entendu ladite témoin.

Projet de loi visant l’égalité réelle entre les langues officielles du Canada

Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Ajournement du débat

L’honorable René Cormier propose que le projet de loi C-13, Loi modifiant la Loi sur les langues officielles, édictant la Loi sur l’usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale et apportant des modifications connexes à d’autres lois, soit lu pour la troisième fois.

— Honorables sénateurs, le Canada est ancré dans un territoire qui est occupé depuis des temps immémoriaux par les peuples autochtones. La pleine reconnaissance de cette réalité, des impacts de la colonisation et de l’importance de travailler à la réconciliation est essentielle à la construction du Canada d’aujourd’hui et de demain.

Aussi, je tiens à souligner que les terres sur lesquelles nous sommes rassemblés et à partir desquelles je vous parle font partie du territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.

Je suis heureux et fébrile de prendre la parole aujourd’hui à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-13, Loi modifiant la Loi sur les langues officielles, édictant la Loi sur l’usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale et apportant des modifications connexes à d’autres lois.

En tant que parrain du projet de loi et président du Comité sénatorial permanent des langues officielles, c’est avec deux citations en tête que je m’adresse à vous.

La première est celle du photographe québécois Martin Paquette. Cet artiste-aventurier affirmait ce qui suit, et je cite :

La réussite est comme l’ascension d’une montagne, il faut travailler en équipe, faire face aux obstacles ainsi qu’aux intempéries, mais peu importe nous atteignions toujours le sommet.

La deuxième est un proverbe tibétain qui répond bien à la citation de Martin Paquette, et qui dit : « Quand tu es arrivé au sommet de la montagne, continue de grimper ». J’ajouterais d’ailleurs à ces mots que le travail n’est jamais fini.

Chers collègues, le vaste chantier de la modernisation de la Loi sur les langues officielles, entamée il y a plusieurs années, a atteint aujourd’hui un point culminant.

Il y aura toujours du travail à faire en matière de droits linguistiques et de protection des minorités, mais le projet de loi que nous avons devant nous marque une étape très importante pour accéder à une pleine reconnaissance des droits linguistiques au Canada.

D’entrée de jeu, je tiens à reconnaître le travail remarquable accompli ces dernières années en la matière par les comités parlementaires, y compris le Comité sénatorial permanent des langues officielles, mais aussi par tous les organismes et individus de la société civile qui ont consacré énormément d’énergie, de ressources et d’efforts pour arriver là où nous en sommes aujourd’hui.

Nous n’avons qu’à penser aux centaines de témoins entendus au cours des dernières années, aux nombreux mémoires déposés, ainsi qu’aux rapports publiés et aux recommandations formulées.

Les propositions de modernisation reçues et étudiées au Sénat depuis 2017 ont été très variées et ont fait l’objet de débats rigoureux.

Le projet de loi C-13, un projet de loi visant l’égalité réelle entre les langues officielles du Canada, interpelle l’ensemble de la société canadienne, car la démarche de modernisation de la Loi sur les langues officielles est plus urgente que jamais, si l’on tient compte des réalités suivantes : la dernière refonte majeure de cette loi remonte à 1988; le nouveau contexte démographique, institutionnel et technologique exige que cette loi de nature quasi constitutionnelle soit modernisée pour l’adapter aux nouvelles réalités; le déclin du français est visible partout au pays, y compris au Québec. Je mentionnerai également la diminution du poids démographique des francophones hors Québec; le besoin de protection accrue des communautés linguistiques en situation minoritaire et d’un appui accru au bilinguisme; les problèmes récurrents de conformité à la loi de la part des institutions fédérales; voilà autant de facteurs qui exigent une modernisation de cette loi.

C’est dans ce contexte que le document de réforme qui a été rendu public par le gouvernement en février 2021 et qui établissait les grandes orientations en vue de la modernisation de la Loi sur les langues officielles s’est traduit en juin 2021 par le dépôt du projet de loi C-32, qui est mort au Feuilleton et qui est à la source du projet de loi C-13.

Nous voici à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-13, qui est une version largement modifiée du projet de loi C-32, compte tenu de l’important travail réalisé par les députés de tous les partis de l’autre endroit, et aussi grâce à votre travail, chers collègues.

Il faut reconnaître que l’étude préalable réalisée par le Comité sénatorial permanent des langues officielles entre mai et novembre 2022 a contribué à cette bonification du projet de loi.

La version du projet de loi C-13 que vous avez entre les mains est le fruit de centaines d’amendements déposés, débattus, rejetés et adoptés. Il est l’aboutissement de compromis et de négociations, non seulement entre les partis politiques, mais également entre les gouvernements, comme le témoigne l’entente conclue entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec.

[Traduction]

Le projet de loi vise à concilier soigneusement les besoins, les intérêts, et les aspirations des Canadiens, qu’ils appartiennent à une communauté de langue officielle en situation majoritaire ou minoritaire. Néanmoins, le projet de loi C-13 suscite encore des préoccupations, dont certaines ont été exprimées devant le Comité sénatorial permanent des langues officielles au cours de ses récents travaux.

Comme vous le savez, le 1er juin 2023, le comité a été chargé d’étudier le projet de loi C-13. Depuis que le comité a fait rapport sur la teneur de ce projet de loi le 17 novembre 2022, la Chambre des communes y a apporté plus de 60 amendements. Le comité se réjouit du travail accompli à l’autre endroit afin d’améliorer le projet de loi C-13 pour qu’il corresponde davantage aux attentes des parties prenantes.

Cela dit, au cours des deux séances consacrées à l’étude du projet de loi C-13, votre comité a eu le privilège d’entendre la ministre des Langues officielles, la présidente du Conseil du Trésor, leur personnel, le commissaire aux langues officielles, trois experts, et les deux principales organisations civiles représentant les minorités anglophones du Québec et les communautés francophones à l’extérieur du Québec.

Bien que votre comité n’ait proposé aucun amendement, il a respectueusement soumis huit observations importantes que j’aborderai plus loin dans mon intervention. Cependant, permettez-moi d’abord de présenter quelques-uns des principaux éléments positifs du projet de loi.

(1600)

[Français]

Je commencerai par la refonte complète de la partie VII de la Loi sur les langues officielles qui vise à favoriser l’épanouissement des minorités anglophones et francophones du Canada et à appuyer leur développement, ainsi qu’à promouvoir la pleine reconnaissance et l’usage du français et de l’anglais dans la société canadienne.

Grâce à l’adoption du projet de loi C-13, les obligations des institutions fédérales feront l’objet de plusieurs nouvelles dispositions, dont le renforcement du cadre de prise de mesures positives par les institutions fédérales.

Le projet de loi C-13 prévoit également l’obligation d’adopter une politique d’immigration francophone afin, notamment, de favoriser le rétablissement et l’accroissement du poids démographique des minorités francophones du Canada. Il s’agit là d’une avancée notable.

Le projet de loi C-13 permet aussi de renforcer les engagements du gouvernement fédéral quant aux possibilités d’apprentissage de qualité équivalente dans la langue de la minorité tout au long du continuum en éducation, soit de la petite enfance au postsecondaire. Il permet de plus d’appuyer la création et la diffusion d’information scientifique en français, de favoriser l’acceptation et l’appréciation par le public du français et de l’anglais, ou bien de promouvoir au pays et à l’étranger le caractère bilingue du Canada.

Le projet de loi C-13 propose ainsi des changements fondamentaux à la partie VII, incluant des obligations pour deux nouveaux ministres : la ministre des Affaires étrangères et le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté.

La promotion du français au pays, ainsi que la vitalité des communautés en situation minoritaire, sauront bénéficier de cet important levier législatif à leur disposition.

De plus, en ce qui concerne les clauses linguistiques, le projet de loi C-13 oblige maintenant les institutions fédérales à prendre les mesures nécessaires pour favoriser l’inclusion de telles clauses dans l’élaboration d’ententes avec les gouvernements provinciaux et territoriaux. Cela permettra de favoriser la progression vers l’égalité du français et de l’anglais dans la société canadienne et d’appuyer les communautés de langues officielles en situation minoritaire.

[Traduction]

Par conséquent, chers collègues, cette approche est fondée sur la coopération et la négociation entre le gouvernement fédéral et les provinces et territoires, l’intention étant de respecter la compétence et les pouvoirs des provinces et des territoires.

Lorsqu’il aura reçu la sanction royale, le projet de loi C-13 élargira le pouvoir du Conseil du Trésor d’évaluer et de surveiller la conformité des organismes fédéraux et l’obligera à prendre les mesures nécessaires pour promouvoir l’inclusion de dispositions relatives à la langue. Le projet de loi élargira également le pouvoir du commissaire aux langues officielles d’émettre des ordonnances en vertu des parties IV et V de la Loi sur les langues officielles et de certaines dispositions clés de la partie VII liées au processus entourant la prise de mesures positives.

[Français]

Dans le même ordre d’idées, en ce qui concerne la vitalité des communautés en situation linguistique minoritaire, il y a une autre mesure phare du projet de loi C-13 — celle d’énoncer l’obligation du gouvernement fédéral d’estimer le nombre d’ayants droit en vertu de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Cela fait des années que les parties prenantes déplorent le manque de données permettant de pleinement dénombrer les ayants droit à l’éducation dans la langue de la minorité. Une estimation adéquate des ayants droit sera bénéfique à la planification des programmes d’éducation des provinces et des territoires, des conseils scolaires et des collectivités.

Grâce à cette nouvelle disposition législative, le gouvernement va participer, à l’aide des outils nécessaires — dont le Recensement de la population — à l’estimation du nombre d’ayants droit. Dans le respect des champs de compétences des provinces et des territoires, le fédéral pourra ainsi collaborer avec les provinces et les territoires ou les commissions scolaires en vue d’obtenir un portrait plus juste du nombre d’ayants droit.

Les différentes méthodes, les différents instruments et les différentes sources de collectes de données sont appelés à évoluer à l’avenir. Une chose est pourtant évidente : ce nouvel engagement enchâssé dans la Loi sur les langues officielles modernisée assurera une garantie de pratique nécessaire pour la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Il lance aussi un message clair quant à l’engagement du gouvernement du Canada en matière d’éducation dans la langue de la minorité.

Je ne peux pas aborder la partie VII de la Loi sur les langues officielles sans rappeler son rôle auprès des communautés d’expression anglaise du Québec. La Loi sur les langues officielles contient l’engagement du gouvernement fédéral de promouvoir le français et l’anglais dans la société canadienne. Elle contient aussi un engagement d’appuyer la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire, soit les communautés francophones hors Québec, mais tout autant les communautés d’expression anglaise du Québec.

[Traduction]

Voici comment le projet de loi C-13 soutiendra la communauté d’expression anglaise au Québec. Le projet de loi C-13 contient de nombreuses mesures qui profiteront au Québec anglophone et contribueront à sa protection et à son développement en tant que communauté de langue officielle en situation minoritaire.

Nous avons entendu de nombreux représentants de la communauté anglophone exprimer des préoccupations concernant leurs droits linguistiques, l’effet du projet de loi C-13 sur leurs communautés au Québec et l’asymétrie. Nous avons entendu leur crainte que le projet de loi creuse un fossé entre les communautés anglophones et francophones et qu’il fasse disparaître les bonnes perspectives d’emploi.

Néanmoins, chers collègues, les exemples suivants devraient prouver que la communauté anglophone du Québec se porterait mieux avec le projet de loi C-13 que sans lui.

D’abord, dans le préambule, y compris à l’article 41 du projet de loi, on reconnaît le caractère unique et pluriel des minorités francophones et anglophones et leurs contributions à la société canadienne. Ces dispositions reconnaîtront la spécificité et la diversité de ces communautés, une réalité sociodémographique qui n’était pas clairement reflétée dans la loi de 1988. Ces changements constituent une reconnaissance de la contribution importante et historique des minorités francophones et anglophones du Canada.

[Français]

Le projet de loi C-13 permettra aux communautés d’expression anglaise du Québec de jouir de ressources d’appui à l’éducation dans la langue de la minorité, soit l’anglais, et d’appui à l’apprentissage de la langue française à titre de langue seconde.

Selon ma compréhension, ces communautés seront aussi admissibles que les communautés francophones aux programmes d’appui aux langues officielles. Des projets spécifiques à leurs communautés seront appuyés pour répondre à leurs priorités dans des domaines variés et essentiels à leur développement.

Ainsi, tant dans le préambule que dans la partie VII, le projet de loi C-13 reconnaît l’importance de soutenir les secteurs essentiels tels que la culture, l’éducation — de la petite enfance à l’enseignement postsecondaire —, les secteurs de la santé, de la justice, de l’emploi et de l’immigration à l’épanouissement des communautés francophones et anglophones en situation minoritaire, et de protéger et favoriser la présence d’institutions fortes au service de ces communautés.

Le projet de loi propose également des actions concrètes pour soutenir ces secteurs-clés, telles que l’établissement d’un nouvel engagement du gouvernement du Canada à faire progresser les possibilités pour les communautés anglophones et francophones en situation minoritaire de poursuivre un apprentissage de qualité, dans leur propre langue, tout au long de leur vie.

Parmi les mesures que le ministre du Patrimoine canadien peut prendre pour favoriser l’égalité de statut et d’usage de nos deux langues officielles, notons, par exemple, l’octroi de fonds pour l’administration d’un programme indépendant qui appuie les causes types dans le domaine des droits linguistiques, et du droit à un traitement égal devant la loi garanti par la Constitution du Canada.

[Traduction]

Ces mesures devraient notamment être prises pour favoriser l’épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire, y compris les communautés anglophones au Québec. Elles doivent aussi être prises en respectant :

[...] la nécessité de prendre en considération les besoins propres à chacune des deux collectivités de langues officielles, compte tenu de leur égale importance [...]

Ces ajouts ne laissent aucun doute sur l’importance égale des deux communautés de langue officielle en situation minoritaire.

Plus précisément, le projet de loi renforce et clarifie l’obligation des institutions fédérales de prendre des mesures positives, une obligation essentielle pour assurer le développement et la protection des communautés de langue officielle en situation minoritaire partout au Canada, y compris des communautés anglophones au Québec.

Le projet de loi apporte aussi des précisions sur les attentes envers les institutions fédérales lorsqu’elles prendront des mesures positives. Les mesures doivent s’appuyer sur des analyses qui peuvent être fondées sur le résultat d’activités de dialogue et de consultation. Ces nouvelles obligations concernant les activités de dialogue et de consultation sont décrites explicitement dans le projet de loi C-13, ce qui garantira que les institutions fédérales respectent un certain seuil lorsqu’elles prennent des mesures positives en tenant compte des besoins des communautés de langue officielle en situation minoritaire.

(1610)

Les institutions doivent également établir des mécanismes d’évaluation et de surveillance des mesures positives qui sont prises. Le projet de loi C-13 garantit que les institutions fédérales continueront à fournir des services dans les deux langues officielles.

[Français]

Comme nous l’avons entendu dire par certains des experts que nous avons reçus lors de l’étude récente au comité, la mention de la Charte de la langue française du Québec n’enlève aucun droit aux communautés anglophones du Québec. Le projet de loi C-13 reconnaît simplement l’existence d’une loi provinciale.

En réponse à une question qui lui était posée à cet égard, Me Janice Naymark a affirmé devant le comité qu’il n’y avait pas « d’incorporation par renvoi » avec cette mention.

D’ailleurs, voici ce qu’un avocat du ministère de la Justice, Me Warren Newman, a affirmé à ce sujet lors de sa comparution devant le Comité des langues officielles de l’autre endroit, et je cite :

Je ne vois pas en quoi les services fédéraux offerts par les institutions fédérales seraient compromis par la simple mention du fait que le gouvernement reconnaît la Charte de la langue française et les autres régimes linguistiques comme faisant partie du contexte global.

Étant donné que Me Newman a participé à l’élaboration des propositions législatives au moment de la première modernisation de la Loi sur les langues officielles en 1988, son éclairage en la matière est fort apprécié.

Nous avons aussi entendu au comité que le projet de loi C-13 ne brimera pas les droits des Québécois d’expression anglaise. Me Michel Doucet, avocat et spécialiste en matière de langues officielles, a affirmé ce qui suit devant le comité, et je cite :

Les articles 16 à 20 et 23 de la Charte continueront à s’appliquer et à reconnaître des droits constitutionnels aux Anglo-Québécois. On ne peut pas leur enlever ces droits. L’article 133 demeurera également. Les droits qu’ils avaient constitutionnellement sur le plan linguistique demeurent, malgré la référence à la loi 96 dans la loi fédérale.

Me Doucet a aussi tenu à préciser que cet article 133, qui prévoit des garanties constitutionnelles quant à l’usage du français et de l’anglais dans les débats du Parlement et de l’Assemblée nationale au Québec, créait déjà une « asymétrie » sur le plan linguistique lors de la création du Canada en 1867.

En effet, l’article 133 reconnaissait des droits aux anglophones au Québec, alors que les francophones des autres provinces n’avaient pas ces mêmes droits. L’asymétrie relative aux droits linguistiques n’est donc pas sans précédent.

Cela dit, dans les observations contenues dans son troisième rapport, le comité a bien pris note que la ministre des Langues officielles, la présidente du Conseil du Trésor et le commissaire aux langues officielles ont promis de surveiller de près les effets du projet de loi C-13.

Votre comité croit qu’ils devront accorder une attention particulière aux développements touchant les communautés anglophones du Québec et faire régulièrement rapport des effets du projet de loi C-13 partout au Canada, sans attendre l’examen de la loi prévu dans 10 ans.

Je souhaite maintenant aborder un autre sujet d’importance dont le comité sénatorial a été saisi au cours de ses délibérations, soit celui des langues autochtones.

Nous avons été informés que, dans le contexte de la démarche visant à moderniser la Loi sur les langues officielles, les chefs de l’Assemblée des Premières Nations, d’Inuit Tapiriit Kanatami et du Ralliement national des Métis ont rencontré la ministre Joly pour discuter de l’approche du gouvernement à l’égard des langues officielles. De plus, lors des consultations de 2019 sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles, des groupes autochtones ont participé au processus.

En étudiant le projet de loi C-13, le comité a aussi appris que la ministre des Langues officielles, Mme Ginette Petitpas Taylor, a rencontré le commissaire aux langues autochtones ainsi que des leaders autochtones du Nord.

[Traduction]

Chers collègues, les langues autochtones font partie intégrante de la diversité culturelle et identitaire de la société canadienne. La revitalisation et le renforcement des langues autochtones et la réforme de la loi sur les langues officielles doivent aller de pair.

La Loi sur les langues officielles modernisée dispose que rien ne doit faire obstacle au maintien et à la valorisation des langues autres que le français ou l’anglais, ni à la réappropriation, à la revitalisation et au renforcement des langues autochtones.

[Français]

La Loi sur les langues officielles et la nouvelle Loi sur l’usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale ne peuvent porter ombrage au soutien et à la promotion des langues autochtones, et ce, dans le respect de la Loi sur les langues autochtones, une loi qui a d’ailleurs besoin de plus de mordant pour qu’on puisse protéger et améliorer la situation des langues autochtones au pays.

Comme nous l’avons entendu au comité, la Loi sur les langues officielles et la Loi sur les langues autochtones sont deux lois complémentaires qui cherchent à revitaliser et à assurer l’épanouissement et la vitalité de ces langues et de ces communautés.

En effet, bien qu’il faille donner à chaque loi son champ d’application, Me Newman a confirmé devant le comité qu’il faut lire ces lois canadiennes identitaires de manière harmonieuse.

Nous avons aussi entendu au comité que le projet de loi C-13 est tout à fait conforme à l’esprit de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et que le gouvernement fédéral s’efforce de tenir compte de l’enjeu des langues autochtones dans la fonction publique fédérale.

À titre d’exemple, nous avons entendu que le gouvernement a développé un nouveau cadre sur la formation linguistique qui se veut davantage inclusif que la formation qui existe en ce moment, afin d’assurer une formation adaptée à tous les groupes en quête d’équité, y compris les employés autochtones.

Dans son troisième rapport, le comité a d’ailleurs fait état de certaines observations relativement aux langues autochtones qui pourront servir de feuille de route pour le gouvernement fédéral et le Parlement au cours des prochaines années. Permettez-moi de souligner le leadership et le travail effectué par mes collègues la sénatrice Michèle Audette et la sénatrice Bernadette Clement; je les remercie pour le travail qu’elles ont fait et présenté au comité.

Voici, chers collègues, un extrait pertinent du rapport déposé au Sénat, et je cite :

Les langues autochtones sont reconnues par la Loi sur les langues autochtones ainsi que, pour la première fois, sont reconnues dans les amendements proposés à la LLO. C’est un petit pas pour avancer la réconciliation.

Dans cet esprit de réconciliation et de respect des droits de gouvernance et d’autodétermination des peuples autochtones, nous nous attendons donc à ce que le gouvernement fédéral respecte ses obligations prévues dans la Loi sur les langues autochtones.

Dans un article qu’il a publié dans le cadre du 50e anniversaire de la Loi sur les langues officielles, et qui s’avère tout aussi pertinent dans le cadre du présent débat, le commissaire aux langues officielles affirmait ce qui suit, et je cite :

Les langues autochtones sont un élément important du paysage culturel du Canada. Dans un esprit de réconciliation et conformément aux valeurs fondamentales qui les unissent, tous les Canadiens peuvent appuyer les premières langues et les langues officielles du pays.

Chers collègues, nous devons tous et toutes soutenir les langues autochtones et les langues officielles en utilisant les véhicules législatifs fédéraux à notre disposition pour mener à bien les progrès souhaités, soit la Loi sur les langues officielles pour les deux langues officielles du pays, et la Loi sur les langues autochtones pour les premières langues.

Votre comité adhère à cette affirmation selon laquelle les peuples autochtones au Canada, avec leurs expériences et leurs histoires uniques, s’attendent à ce que le gouvernement du Canada remplisse ses engagements envers eux tels qu’ils ont été élaborés et adoptés dans la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, dans les appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, dans les appels à la justice de l’Enquête nationale sur les femmes et filles autochtones disparues et assassinées, ainsi que dans la Loi sur les langues autochtones.

(1620)

Votre comité constate que, en l’absence d’une réforme substantielle du régime de droit qui gouverne les langues autochtones, les peuples autochtones ont peu de recours et de moyens pour œuvrer à la réappropriation, à la revitalisation et au renforcement des langues autochtones.

Votre comité estime importante la reconnaissance des langues des Premières Nations, des Métis et des Inuits comme étant les premières langues de ce territoire, comme on l’énonce dans la Loi sur les langues autochtones.

Par ailleurs, votre comité note que la Loi sur les langues autochtones prévoit que le ministre responsable a l’obligation de mener un examen indépendant des dispositions et de l’application de la loi dans les cinq ans suivant son entrée en vigueur et tous les cinq ans par la suite.

Dans un esprit de réconciliation et de décolonisation, votre comité s’attend à ce que le gouvernement fédéral se conforme à ses obligations, et même qu’il dépasse les attentes juridiques minimales dans le respect des droits de gouvernance et d’autodétermination des peuples autochtones du Canada.

[Traduction]

Le projet de loi C-13 précise également les rôles et les responsabilités du ministre du Patrimoine canadien, du président du Conseil du Trésor et du Conseil du Trésor. Il met également à profit leurs forces respectives, qui sont liées à leurs champs d’expertise et d’action.

Le projet de loi C-13 renforce les attributions du Conseil du Trésor, qui deviennent obligatoires, et ajoute d’autres attributions, dont celles liées à l’obligation des institutions fédérales de prendre des mesures positives. Ces responsabilités et fonctions sont alignées sur le rôle du Conseil du Trésor en tant que conseil de gestion, en tant qu’employeur de la fonction publique et en tant qu’entité qui émet des directives aux institutions fédérales et en surveille le respect.

Le projet de loi C-13 propose de confier au Conseil du Trésor le rôle de surveillance et celui d’informer les institutions fédérales des exigences en matière de langues officielles. Patrimoine canadien, quant à lui, demeurera le ministère axé sur le public canadien, y compris les communautés de langue officielle en situation minoritaire, avec une expertise et un savoir-faire de longue date en la matière.

[Français]

J’aimerais maintenant aborder brièvement les nouvelles obligations de promotion du français prévues pour les entreprises privées de compétence fédérale, en vertu de la partie 2 du projet de loi C-13, qui édicte la Loi sur l’usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale.

Le projet de loi C-13 reconnaît notamment que le secteur privé a un rôle à jouer dans la promotion et la protection du français. Pour cette raison, le projet de loi prévoit de nouveaux droits et obligations assurant la possibilité pour les consommateurs de communiquer en français avec certaines entreprises privées de compétence fédérale et des droits en matière de langue de travail permettant aux employés de communiquer en français.

[Traduction]

Je suis d’avis que ce nouveau régime assurera une protection accrue du français, tant pour les francophones de certaines régions à forte présence francophone que pour la population francophone du Québec. L’étude préliminaire effectuée par le comité a porté, en partie, sur la nouvelle loi concernant l’utilisation du français dans les entreprises privées sous réglementation fédérale. Elle a sans doute influencé les travaux de l’autre Chambre sur le sujet.

[Français]

Après l’adoption de ce projet de loi, le travail ne sera pas terminé. Le processus de prise de règlements sera lancé dès que le projet de loi aura reçu la sanction royale. Ces règlements sont primordiaux pour la mise en œuvre de certaines mesures phares. Trois règlements sont prévus : un premier sur la prise de mesures positives, un deuxième pour entreprises privées de compétence fédérale et un troisième sur les sanctions administratives pécuniaires.

Concrètement, la mise en œuvre d’une loi modernisée commence avec la sanction royale, mais la réforme ne prendra forme dans son entièreté qu’à la suite de la prise de règlements et de la mise en œuvre subséquente de certaines mesures et de nouveaux régimes par l’intermédiaire de décrets.

Bien qu’une révision de la loi soit prévue dans 10 ans, il n’est pas nécessaire d’attendre 10 ans pour y apporter des améliorations.

C’est dans cet esprit que votre comité a présenté huit observations qui, nous l’espérons, seront prises en considération par le gouvernement et par l’ensemble des parlementaires au cours des prochains mois et des prochaines années.

Ces observations traitent des enjeux suivants : la surveillance de la mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles; les communautés anglophones du Québec; le dénombrement des enfants des ayants droit; la Constitution bilingue; la découvrabilité du français dans l’espace numérique; le Bureau de la traduction; les langues autochtones.

Comme j’ai déjà fait référence à certaines de ces observations précédemment dans mon allocution, permettez-moi de parler brièvement de deux autres observations.

La première observation traite de la Constitution bilingue. Votre comité constate que certains textes constitutionnels établissant les bases de la Confédération canadienne, comme la Loi constitutionnelle de 1867, ne sont toujours officiels qu’en anglais.

Votre comité a pris note que le Sénat avait adopté à l’unanimité, le 29 mars 2022, une motion présentée par notre collègue le sénateur Dalphond, que je remercie, qui demandait ce qui suit au gouvernement :

[...] de considérer, dans le contexte de la révision de la Loi sur les langues officielles, l’ajout d’une exigence voulant qu’un rapport soit soumis aux 12 mois détaillant les efforts déployés pour assurer le respect de l’article 55 de la Loi constitutionnelle de 1982.

Votre comité propose que le gouvernement fédéral mette en œuvre les mesures proposées dans la motion du Sénat afin de soutenir la progression vers l’égalité de statut des deux langues officielles, en faisant en sorte que le ministre de la Justice du Canada respecte l’article 55 de la Loi constitutionnelle de 1982, qui prévoit que tous les textes constitutionnels figurant à l’annexe de cette loi soient rédigés et adoptés en français.

De plus, votre comité recommande au gouvernement fédéral de soumettre un rapport aux 12 mois au Sénat et à la Chambre des communes, comme le stipule la motion, détaillant les efforts déployés pour assurer le respect de cet article.

J’en profite pour remercier très sincèrement notre ancien collègue l’honorable Serge Joyal d’avoir soumis un mémoire à cet égard au comité.

La deuxième observation traite de la découvrabilité du français dans l’espace numérique. Toujours inspiré par le mémoire de l’honorable Serge Joyal, votre comité est aussi d’avis que la présence et la découvrabilité de toute œuvre, création, recherche de quelque genre que ce soit en langue française sont essentielles pour assurer pleinement la pérennité du fait français au pays.

Votre comité recommande donc au gouvernement fédéral de continuer à prendre des initiatives concrètes pour assurer la diffusion et la découvrabilité du contenu canadien en français.

En conclusion, chers collègues, bien que je n’aie pas couvert la totalité des propositions de ce projet de loi, qui en contient un nombre considérable, et bien que je n’aie pas parlé de l’ensemble des observations faites par votre comité, cela n’enlève rien à leur importance pour l’avenir de notre régime linguistique, qu’il s’agisse des propositions visant à assurer le bilinguisme du système judiciaire, de la fonction publique ou d’autres aspects du projet de loi.

Les Canadiens et les Canadiennes, et particulièrement les francophones de partout au pays, attendent avec impatience la sanction royale du projet de loi C-13.

Le comité l’a entendu de la part de plusieurs intervenants : tout délai supplémentaire dans l’adoption d’une Loi sur les langues officielles modernisée ne peut que laisser présager d’autres reculs au détriment de la francophonie canadienne.

En réponse à une question posée par la présidente suppléante du Comité sénatorial permanent des langues officielles, l’honorable Lucie Moncion, qui a demandé quelles seraient les répercussions sur les communautés minoritaires dans le cas d’une adoption tardive du projet de loi C-13, le directeur général de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada a affirmé ceci lors de sa comparution :

[...] les niveaux d’immigration pour le Canada doivent être déterminés en novembre prochain pour les trois prochaines années. On sait que le ministère fait tout un exercice de consultation qui commence maintenant et qui se termine probablement à la fin de l’été ou début de l’automne pour l’immigration, et les cibles pour les trois prochaines années, pour le pays en entier, incluant l’immigration francophone. Donc, si on n’a plus le projet de loi C-13 qui donne cette directive très claire qu’il nous faut des cibles réparatrices, alors cela pourrait avoir un impact pour les trois prochaines années.

Chers collègues, il a été largement prouvé qu’une volonté politique issue de tous les partis de l’autre endroit est au rendez‑vous pour accomplir une réforme ambitieuse de la Loi sur les langues officielles. C’est donc une occasion inestimable dont il faut profiter qui est maintenant entre nos mains.

Je crois fortement qu’un tel instrument législatif sera en mesure de créer les conditions nécessaires pour renverser les tendances linguistiques actuelles. Ainsi, je ne peux que vous inviter à voter en faveur de ce projet de loi dans les plus brefs délais. Son adoption par le Sénat permettra aux Canadiens et Canadiennes d’envisager l’avenir des langues officielles au Canada avec plus de confiance et plus de certitude.

(1630)

En terminant, sur une note personnelle, je dirai ceci : un peu à l’image des enjeux associés à l’escalade d’une montagne qu’a brossée l’artiste-aventurier Mario Paquette, en disant qu’il faut travailler en équipe, faire face aux obstacles ainsi qu’aux intempéries, ensemble, nous pouvons nous inspirer de cette vision. Nous arrivons toutes et tous au Sénat avec les aspirations et les rêves de nos communautés, mais nous portons aussi les blessures des générations qui nous ont précédés et celles que doivent affronter nos communautés aujourd’hui.

Chacun et chacune d’entre nous porte le poids de l’impact de l’histoire sur nos cultures, nos langues et nos communautés. Nous avons en commun le désir d’améliorer le sort des nôtres. Il y a au Canada des réalités troublantes et absolument inacceptables, particulièrement pour les peuples autochtones. Il faut le reconnaître et faire preuve de bienveillance, de respect et de compréhension les uns envers les autres.

Il faut aussi se donner la main, se serrer les coudes et travailler ensemble avec ouverture pour que nos rêves communs se réalisent.

Chers collègues, je siège au Comité sénatorial permanent des langues officielles depuis mon arrivée au Sénat. L’esprit de collaboration qui y règne m’a toujours ému.

Au-delà de la partisanerie, au-delà de nos différences, nous arrivons toujours à des consensus qui bénéficient à tous les Canadiens et Canadiennes. Je tiens d’ailleurs à remercier la sénatrice Moncion, qui a assumé la présidence du comité avec rigueur et équité au moment de l’étude du projet de loi C-13.

J’émets le souhait profond et sincère que nous continuions d’être inspirés par cet esprit. Un peu comme une équipe qui gravit la montagne en prenant soin les uns des autres, nous nous assurerons d’atteindre le sommet, de contempler le ciel et la terre devant nous et de célébrer ensemble ce que nous aurons réussi à accomplir, pour le bien de tous et de toutes.

Merci. Meegwetch.

Des voix : Bravo!

[Traduction]

Le sénateur Quinn : Le sénateur accepterait-il de répondre à une question?

[Français]

Le sénateur Cormier : Bien sûr.

[Traduction]

L’honorable Jim Quinn : Je vous remercie de votre discours, qui a souligné tout le travail que le comité a accompli et toutes les discussions qui ont eu lieu. J’ai pris note que l’autre endroit a fait 60 amendements. Le projet de loi a été présenté au Sénat, renvoyé au comité. On a déjà reconnu qu’il y a une erreur de rédaction dans le projet de loi. Cette erreur aura pour conséquence que les francophones à l’extérieur du Québec ne seront pas traités de la même façon que les francophones du Québec pendant une certaine période; c’est un enjeu d’égalité. Je pense que nous devrions le prendre en considération.

Je reconnais que vous êtes un ardent défenseur de l’égalité. En fait, vous avez récemment déclaré qu’il incombe à toutes les instances législatives de veiller à adopter des stratégies qui contribuent à l’avancement des droits plutôt qu’à leur restriction.

Nous nous apprêtons à accepter un projet de loi qui contient une erreur, comme d’aucuns l’ont reconnu il y a deux ou trois semaines, et 60 amendements proposés par l’autre endroit, mais aucun amendement du Sénat. Pourtant, nous allons probablement adopter le projet de loi avec cette erreur qui désavantage nos collègues dans la province que je représente, en particulier dans le Nord, pour une période de deux ans, ou plus, tout dépendant de la scène politique ou d’où en sera le gouvernement à ce moment-là. Placer tous nos concitoyens d’un bout à l’autre du pays sur un pied d’égalité, n’est‑ce pas là une question dont nous devrions nous préoccuper et qui mérite une réflexion de notre part?

Le sénateur Cormier : Merci de votre question, monsieur le sénateur. Je tiens à vous remercier de l’importance que vous accordez aux langues officielles. Nous en avons tenu compte.

[Français]

Nous avons effectivement considéré cela. Monsieur le sénateur, j’ai consulté nos collègues et nos compatriotes du Nouveau‑Brunswick. Mon équipe et moi avons parlé avec la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick, dont les communautés seraient affectées par cette question. Les communautés, par le biais de l’organisme porte-parole qu’est la Société de l’Acadie du Nouveau‑Brunswick, se sont dites rassurées par le fait qu’un processus de consultation soit mis en place pour mieux définir la question de la détermination d’une région à forte présence francophone. Ils sont certains que ce processus permettra de le faire et ils ont réitéré — et je l’affirme — l’importance d’adopter ce projet de loi dès maintenant. Les effets de la non-adoption du projet de loi seront pires qu’un délai de deux ans pour obtenir plus de précisions et de consultations sur cette question.

Le sénateur Quinn : Merci beaucoup, sénateur. Je me demande néanmoins s’il s’agit d’une situation où l’on peut constater une inégalité dans le traitement d’une partie de notre population, pas seulement au Nouveau-Brunswick, mais ailleurs au pays.

[Traduction]

Cette situation me fait penser à la réputation du Sénat liée à son rôle, dont nous avons parlé à maintes reprises dans cette enceinte. Il s’agit d’un rôle de second examen objectif; nous avons eu trois semaines pour envisager d’apporter un petit amendement. Soit dit en passant, si quelque chose tourne mal au cours de cette période de deux ans, les droits des francophones au Québec et les droits de ceux qui vivent à l’extérieur du Québec seront perdus à cause de l’erreur de rédaction. Pourquoi ne pas avoir corrigé cette erreur de rédaction plutôt que d’adopter un projet de loi comprenant une erreur est reconnue? Je crains que la réputation du Sénat ne soit une fois de plus remise en question et que nous ne soyons qu’une institution d’approbation à la chaîne.

[Français]

Le sénateur Cormier : Je vous remercie de votre question, sénateur. En fait, le projet de loi, comme tout projet de loi, n’est pas parfait. Nous pourrions y proposer d’autres amendements.

Lorsqu’on parle à la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, qui regroupe des francophones et des Acadiens de toutes les provinces et des territoires, cette association est très claire : elle aussi propose que le projet de loi soit adopté dans sa mouture actuelle.

Vous savez, je pense que nos collègues sont conscients de cette réalité. Les communautés francophones et acadiennes au Canada, tout comme les communautés anglophones au Québec, travaillent à la modernisation de la Loi sur les langues officielles depuis de nombreuses années. Je ne crois pas que la crédibilité du Sénat soit en cause ici; je ne crois pas que notre crédibilité soit en cause dans l’idée que le temps est venu d’adopter ce projet de loi.

Le Sénat a pour principale responsabilité d’être à l’écoute des citoyens des communautés. Ce que l’on nous dit dans les communautés, c’est : « S’il vous plaît, pour le bien-être et le mieux‑être de nos communautés, adoptez ce projet de loi. » C’est l’esprit dans lequel nous avons travaillé. Nous avons proposé huit recommandations solides, sénateur Quinn, et nous veillerons au grain, puisque votre comité continuera de travailler au respect des langues officielles et continuera d’interpeller le gouvernement et le Parlement du Canada sur toute question qui touche les langues officielles dans ce pays. Je vous remercie.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

(1640)

[Traduction]

Projet de loi modifiant la Loi sur la gestion financière des premières nations, modifiant d’autres lois en conséquence et apportant une clarification relativement à une autre loi

Troisième lecture—Débat

L’honorable Marty Klyne propose que le projet de loi C-45, Loi modifiant la Loi sur la gestion financière des premières nations, modifiant d’autres lois en conséquence et apportant une clarification relativement à une autre loi, soit lu pour la troisième fois.

 — Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de prendre la parole sur le territoire non cédé du peuple algonquin anishinabe. Je le fais à l’étape de la troisième lecture, en tant que parrain du projet de loi C-45. Vous vous souviendrez que, comme nous l’avons dit lors des récents débats à l’étape de la deuxième lecture, cette mesure législative vise à modifier la Loi sur la gestion financière des premières nations dans le but de soutenir la réconciliation économique et d’améliorer la prospérité des Premières Nations. Comme j’ai prononcé un discours assez long à l’étape de la deuxième lecture, je vais citer les fameuses paroles du sénateur Baker : « Je serai bref. »

À titre de rappel, le projet de loi C-45 comprend des mesures importantes pour améliorer les cadres financiers à participation facultative de la loi pour les 348 Premières Nations participantes dont le nom est inscrit à l’annexe ainsi que toute Première Nation qui souhaite participer et profiter de cette mesure.

Les améliorations proposées favoriseront l’autodétermination économique en ce qui concerne les autorités fiscales, l’information financière, les emprunts ainsi que le développement et l’entretien des infrastructures. Plus important encore, ce projet de loi crée l’Institut des infrastructures des premières nations, un centre d’excellence pour aider les Premières Nations à obtenir les infrastructures durables de qualité auxquelles elles aspirent. Ces changements vont de pair avec la reconnaissance des droits économiques, sociaux et culturels obtenue en 2021 grâce à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.

Je remercie notre porte-parole, la sénatrice Martin, le Sénat et le Comité des peuples autochtones d’avoir procédé rapidement dans l’étude de cet important projet de loi, dont on a fait rapport sans proposition d’amendement. Cela témoigne des nombreuses années de réflexion créative, de dur travail et de consultations préalables qui ont été mises à contribution pour parvenir au projet de loi C-45. Les architectes de ce projet de loi, dont le sénateur Gold, m’ont remis le rêve de tout parrain. Toutefois, en examinant le détail du projet de loi C-45, j’ai compris que c’est uniquement grâce à la vision, à la détermination et à la minutie de ses principaux responsables que les modifications qui y sont proposées semblent aussi faciles.

Encore une fois, je félicite Ernie Daniels, président-directeur général de l’Administration financière des premières nations, Harold Calla, président exécutif du Conseil de gestion financière des premières nations, Manny Jules, commissaire en chef de la Commission de la fiscalité des premières nations, ainsi qu’Allan Claxton et Jason Calla du Conseil de développement de l’Institut des infrastructures des premières nations et leurs équipes. Comme je l’ai déjà dit, ce projet de loi leur appartient, ainsi qu’aux Premières Nations participantes.

Je tiens également à souligner l’enthousiasme et le dévouement de leur équipe. J’ai été ravi de m’entretenir avec plusieurs membres précieux et dynamiques de leurs organismes à notre cafétéria à la conclusion de l’étude article par article du projet de loi. De toute évidence, ils sont fiers de venir au Sénat pour contribuer à la réconciliation économique. Cette conversation m’a fait sourire et a mis du vent dans mes voiles. Ce rêve est réellement en train de devenir réalité.

Je remercie et je félicite aussi le ministre Miller et son équipe, y compris les fonctionnaires concernés, du leadership dont ils ont fait preuve et des efforts qu’ils ont déployés pour faire progresser le projet de loi C-45, qui a été adopté à l’unanimité à l’autre endroit.

Les modifications proposées à la Loi sur la gestion financière des premières nations élargissent et modernisent le mandat des trois institutions financières dirigées par les Premières Nations et établies aux termes de la loi. La mesure législative dont nous sommes saisis permettra à ces institutions d’offrir des services qui répondent mieux aux besoins grandissants des communautés, et elle créera une quatrième institution liée à l’infrastructure.

Les modifications proposées aideraient également la Commission de la fiscalité des premières nations à appuyer les communautés désireuses d’élaborer des textes législatifs sur les recettes locales qui vont au-delà de l’imposition foncière. Les modifications renforceraient aussi les mesures de soutien en matière de sensibilisation et de capacité, offertes aux communautés qui bâtissent leur économie. Elles élargiraient également les normes de service et d’accréditation du Conseil de gestion financière des premières nations pour les nouveaux segments de clientèle, notamment les conseils tribaux, les groupes régis par un traité et les groupes autonomes, et assureraient une représentation autochtone forte et diversifiée au sein du conseil d’administration.

À l’heure actuelle, trois Premières Nations de la Saskatchewan ont établi un système de gestion financière, et j’en suis très fier. Les Premières Nations de la Saskatchewan ont contracté des prêts pour un total de 174,2 millions de dollars. C’est une réalisation importante pour les Premières Nations.

Pour illustrer les avantages que comporte pour les communautés autochtones la participation à la Loi sur la gestion financière des premières nations, je présente aujourd’hui l’histoire de la nation Mistawasis Nêhiyawak et du chef Daryl Watson, qui a dit :

L’élaboration et la mise en œuvre de politiques et de procédures pour les activités financières quotidiennes conduiront à la viabilité à long terme de la Première Nation Mistawasis Nêhiyawak. Il est primordial de concevoir une structure avec des plans stratégiques et des plans de travail à court et à long terme afin d’assurer une bonne gouvernance administrative pour nos membres, pour les générations futures et pour nos partenaires commerciaux.

La communauté a été inscrite pour la première fois à l’annexe de la Loi sur la gestion financière des premières nations en 2013. Quatre ans plus tard, avec l’aide de la Commission de la fiscalité des premières nations, la communauté a adopté des lois sur l’imposition et l’évaluation foncières. En 2019, elle a fixé des taux d’imposition et adopté une loi sur les dépenses pour la première fois, ce qui lui a permis de collecter plus de 80 000 $ pour aider à soutenir les infrastructures des Premières Nations et les services locaux fournis aux agriculteurs non membres de la communauté qui louent des terres agricoles.

La Première Nation Mistawasis Nêhiyawak adopte une approche modifiée d’imposition des terres agricoles. Elle détermine les taxes moyennes par acre dans la municipalité adjacente et elle envoie une facture aux contribuables en fonction du nombre d’acres loués.

Nous continuerons demain.

Son Honneur la Présidente : Nous allons devoir continuer demain.

(À 16 h 45, conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 13 juin 2023, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)

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